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18 mars 2012 7 18 /03 /mars /2012 18:19

erectus01.jpg

A

vez-vous déjà goûté au porc-épic ? Non ? Alors, venez dîner ce soir. Une fois les épines retirées, vous verrez, c’est un délice.

Cette conversation est imaginée par Yves Coppens et serait l’invitation d’un Homo habilis ayant découvert la gastronomie en même temps que la consommation de viande.

Plus tard Homo egaster ayant découvert le feu a peut-être aussi découvert la cuisson mais les traces d’agapes cuites sont incontestables en ce qui concerne Homo erectus.

Depuis c’est un lieu commun de dire que, s’il faut manger pour vivre, l’homme vit aussi pour manger contrairement à l’adage qui voudrait que l’on s’en tienne à la seule nécessité.

Il est d’ailleurs assez évident qu’il n’est pas le seul à rechercher le plaisir dans la nourriture.

Il n’y a qu’à voir les astuces dont sont capables les singes et même les rats pour obtenir une nourriture en l’absence évidente de toute nécessité.

L’homme ne mange donc pas que pour se nourrir.

Il ne s'agit pas d'une remarque cynique feignant d’ignorer qu'un milliard d'humains sont victimes de sous-nutrition ce qui est un des scandales les plus inacceptables de notre belle société dominée par la toute puissante finance.

Mais dans nos pays surdéveloppés, le rythme anxiogène de la vie dite moderne, pousse hélas trop souvent un nombre de plus en plus important d’individus à manger pour calmer une angoisse en se remplissant convulsivement, le plus rapidement possible et trop de nourritures trop grasses, trop riches, trop sucrées avec les conséquences que l'on connait sur le nombre sans cesse grandissant d'obèses pris au piège de la dépendance non pas à la nourriture mais à l’acte de manger à la recherche d’une satiété hypothétique.

Mais manger peut aussi être un plaisir, c'est-à-dire, autre chose qu’un reflexe plus ou moins compulsif, une activité sociale et élaborée parfois jusqu’au raffinement.

Le plaisir tient bien sûr d’abord à la délicatesse et à l’harmonie des saveurs que les cuisiniers qualifient souvent de notes complétant ainsi l’analogie avec la musique déjà consacrée avec le piano du chef cuistot.

Mais le plaisir de la table ne se résume pas aux contenus des assiettes même s’il constitue un préalable disqualifiant en cas de médiocrité.

C’est aussi attendre avec plus ou moins de patience une promesse alléchante souvent décrite dans une surabondance de qualificatifs, c’est apprécier le dressage harmonieux et raffiné d’une table, c’est quelquefois admirer un paysage dont le souvenir pourra se trouver associé aux saveurs délicates d’un plat et au plaisir partagé, c’est encore être intimidé par la renommée du chef dont il serait malséant de mettre en doute le talent, c’est déguster la saveur du nectar qui accompagne un plat en admirant sa robe, c’est partager en rivalisant de superlatifs avec des proches, etc...

Mais la renommée du chef, la hauteur vertigineuse de la note, la majesté du cadre, la qualité de la compagnie ne sont pas toujours les clefs de nos souvenirs.

Parfois la réminiscence du goût d’une madeleine pour Proust, d’un riz au lait jamais égalé de sa mère, de caramels incomparables de sa grand-mère revient en caravane et nous envahit sans que nous ayons le moindre contrôle sur ce processus.

En conclusion de son article sur la cuisine moléculaire, Bernard Thys pose la question "manger c’est quoi ?" nous invitant à renoncer à l’esclavage de la cuisine traditionnelle.

Il ajoute la recherche des goûts déclinés note à note à cette rencontre de l’homme avec le goût et le plaisir.

Manger, quand il ne s'agit pas uniquement de se nourrir, c'est un acte social, culturel mettant en œuvre de nombreuses connexions dans notre cerveau dont les neurologues pourront sûrement un jour décrypter le mécanisme sans pour autant nous priver de ce plaisir rare quand la gastronomie touche à l’art.


Patrice Leterrier 

18 Mars 2012

 

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15 mars 2012 4 15 /03 /mars /2012 17:44

esclavage.jpg


L

a reconnaissance de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité par la loi du 21 mai 2001 consacrait solennellement le devoir de mémoire que nous impose l’histoire.

Les débats que nous vivons aujourd’hui autour du réchauffement climatique, de l’acidification des océans, des avancées fulgurantes des biotechnologies, de la génétique, des nanotechnologies, du rôle envahissant des technologies de l’information ou encore, par exemple, de la controverse sur l’énergie nucléaire soulèvent la question de savoir s’il n’existe pas aussi une sorte de "devoir d’anticipation" ?.

Le devoir de mémoire est censé nous amener à regarder le passé avec toute l’objectivité scientifique de l’historien.

Il s’agit de prendre conscience de faits dont on peut considérer par les témoignages, les écrits, les documents existants qu’ils sont avérés et incontestables.

Ce n’est à l’évidence pas le souci du législateur lorsqu’il inscrit dans la loi du 23 février 2005 "le rôle positif de la présence française outre-mer".

Le devoir de mémoire, même et peut-être surtout lorsqu’il est outrageusement manipulé par les politiques, peut agir sur nos comportements.

Il peut donc avoir un effet sur le futur dans la mesure où celui-ci est partiellement conditionné par nos agissements d’aujourd’hui.

Le devoir d’anticipation se heurte à une difficulté majeure de savoir, au sens de la connaissance, ce que nous pouvons ou plutôt  nous devons anticiper.

Sans soulever l’énorme problème des croyances qui viennent sans arrêt troubler le discernement des hommes, sans tenir compte du fait que Gaïa est devenue un enjeu marketing et un gagne pain pour certains acharnés "écologistes", y a-t-il un seul domaine où l’on puisse raisonner sur le futur en terme de certitude incontestable ou même à défaut de probable consensuel ?

Le devoir d’anticipation ne peut s’exprimer en démocratie sans que nous soyons collectivement sollicités pour nous prononcer sur les enjeux.

Mais quelle valeur a une opinion lorsque ceux qui savent (les scientifiques) ou ceux veulent (les politiques) sollicitent des citoyens qui n’ont en général aucun moyen d’arbitrer ?

Comment pourraient-ils le faire, sur des sujets qui font l’objet d’âpres débats entre spécialistes et qui en général sont des enjeux mondiaux dépassant largement la compétence des états ?

L’inscription du principe de précaution dans la constitution, si elle peut donner mille raisons de ne rien faire, n’en donne guère pour trancher sur les dangers potentiels que nous font courir notre insouciance face à la question environnementale et les avancées de la science dont il est bien difficile de mesurer les retombées.

Le devoir d’anticipation ne peut donc s’appuyer que sur une compréhension hypothétique des enjeux, sur des hypothèses et des statistiques dont on ne peut vraiment pas dire que nous soyons naturellement armés par notre intuition pour les interpréter.

De plus le devoir d’anticipation vise en général à protéger non pas notre propre avenir non pas même celui de nos enfants mais plus probablement celui des enfants des enfants de nos enfants voire plus lointain encore et les cycles politiques sont plutôt au mieux des décades.

Le devoir d’anticipation, c'est-à-dire notre responsabilité d’assurer un avenir vivable pour les générations futures, ne peut se manifester avec force que si la politique au sens noble du terme remet l’éthique au cœur de sa réflexion et renonce à la démagogie et à la dictature de la finance qui, par nature, est court-termiste.

La déclaration universelle des droits des générations futures est à écrire.


 

Patrice Leterrier

14 Mars 2012

 

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12 mars 2012 1 12 /03 /mars /2012 19:12

superkamiokande.jpg

Super Kamiokandé

"La quantité de réalité la plus infime jamais imaginée par un être humain" Frederick Reines

 

L

a collaboration OPERA avait annoncé un peu imprudemment ou tout au moins prématurément que les neutrinos voyageaient plus vite que la lumière, ce qui remettait sérieusement en cause la théorie de la relativité restreinte.

Mais qui sont ces neutrinos qui auraient la velléité de défier Einstein ?

D’abord une particule qui remplit littéralement l’univers.

Chaque seconde, 65 milliards de neutrinos traversent l’ongle de notre petit doigt et le seul corps humain émet chaque jour la bagatelle de 340 millions de neutrinos qui partent jusqu’au fin fond de l’univers.

Le 23 février 1987 à 7h35 nous avons été traversés par quelques millions de milliards de neutrinos en 10 secondes émis il y a 150 000 ans par l'explosion d'une supernova dans le Grand Nuage de Magellan.

Les neutrinos sont d’abord nés de l’esprit créatif de Wolfang Pauli, le 4 décembre 1930, dans une lettre envoyée aux "Liebe radioaktive Damen und Herren" participants à une conférence se tenant à Tübingen auquel il ne pouvait participer parce qu’il devait assister à un bal dans la nuit du 6 au 7 décembre à Zurich.

Dans sa lettre, Pauli présente sa découverte comme un "remède désespéré au sauvetage du théorème d’échange de la statistique et de la loi de conservation de l’énergie […] la possibilité qu’il existe dans le noyau des particules électriquement neutres de spin1/2, obéissant au principe d’exclusion et dont la masse devrait n’être en aucun cas supérieure à 0.01 masse de proton".

Le pari était audacieux car si chaque fois qu’un physicien n’arrivait pas à résoudre un problème il inventait une particule élémentaire, leur nombre serait aujourd’hui incalculable !

En 1933, Enrico Fermi baptise la particule prédite par Pauli neutrino (petit neutron en italien) et il l’incorpore à une théorie de l’interaction faible.

Il faudra attendre 25 ans pour que le neutrino soit enfin déniché pour la première fois après des mois d’observation à raison de trois neutrinos à l’heure.

Le 15 juin 1956 Clyde Cowan et Frederick Reines, qui avaient placé deux réservoirs de 200 litres pleins d’eau et de chlorure de cadmium à 11 mètres de distance du centre du réacteur nucléaire de Savannah River (Caroline du Sud) pouvaient envoyer à Wolfang Pauli un radiogramme annonçant leur découverte.

Pourquoi une particule aussi présente dans l’univers a-t-elle été si difficile à détecter ?

C’est que sa masse encore inconnue mais pratiquement nulle et l’absence de charge rendent impossible sa détection directe.

Pour voir un neutrino il faut en quelque sorte constater les "dégâts" qu’il produit en entrant en collision avec une autre particule et les routes de l’univers sont encore moins chargées que celles du Sahara.

La première mesure des neutrinos d’origine solaire est due à Ray Davis et John Bacall qu’ils font en enfouissant en 1964 un réservoir contenant 600 tonnes de détergeant dans la mine d’or d’Homestake située dans le Dakota du sud pour que les rayons cosmiques n’interfèrent pas avec leurs mesures.

Les premiers résultats, publiés en 1968, ainsi que les suivants (Kamiokandé en 1989 au Japon, IMB en 1990 aux États Unis, Gallex en Italie et Sage en Russie en 1995, superKamiokandé en 1996) sont obstinément très inférieurs aux prévisions.

Pour comprendre pourquoi les mesures de neutrinos solaires ont toutes donné des résultats inférieurs que les prédictions du modèle solaire, il faut d’abord savoir qu’il existe en fait trois types de neutrinos que l’on appelle des "saveurs" bien que personne n’est jamais pu "gouter" un neutrino.

Celui émit par le soleil est la contrepartie d’un électron et s’appelle donc neutrino électronique.

C’est celui-ci dont Pauli avait eu l’intuition et que C. Cowan et F. Reines ont découvert en 1956.

En 1962, Leon M. Lederman, Melvin Schwartz et Jack Steinberger dénichent le neutrino muonique et lorsque Martin Perl découvre en 1975 un troisième type de lepton, le tau, la théorie veut qu’il doive être associé, comme ses frères l’électron et le muon, à un neutrino dit tauique.

La première détection de neutrinos tau n’a été annoncée qu’à l’été 2000 par la collaboration DONUT au Fermilab, ce qui en fait la dernière des particules du modèle standard d'avoir été directement observée.

En 1989 les mesures faites sur le LEP, nouveau collisionneur de particules du CERN, permettent d’affirmer qu'il n'existe que trois familles de neutrinos. 

L’existence d’au moins deux types de neutrinos avait déjà été proposée par le physicien d’origine italienne Bruno Pontecorvo dès 1957.

L’histoire de Bruno Pontecorvo ressemble à un roman d’espionnage.

Il fut d’abord un assistant d’Enrico Fermi et probablement un espion de l’ex union soviétique.

Le 31 Août 1950, il quitte brusquement l’Italie pour Stockholm avec femme et enfants pour passer via la Finlande en URSS où il finira sa carrière.

Bruno Pontecorvo avait émis l’hypothèse que, si les neutrinos possédaient une faible masse, ils pouvaient osciller en se transformant les uns dans les autres au cours du temps.

Cette hypothèse d’oscillation des neutrinos servira à expliquer le déficit des neutrinos solaires.

Ce n’est qu’en juin 2001 que la collaboration SNO (Sudbury Neutrino Observatory) fournit la solution de l’énigme des neutrinos solaires.

L’expérience située au Canada à 2 kms de profondeur met en jeu un détecteur immergé dans un réservoir de 30 m de haut capable de détecter les "saveurs" des neutrinos qui interagissent avec l’eau lourde qu’il contient alors que les précédentes expériences ne mesuraient que les neutrinos électroniques.

Les résultats publiés en 2002 confirment ceux des expériences précédentes pour les neutrinos électroniques mais montrent que des neutrinos muoniques et tauiques sont également présents à part égale ce qui rend le nombre total de neutrinos conforme au modèle solaire pour autant que l’on admette la possibilité d’oscillations et donc l’existence d’une masse pour les neutrinos.

L’expérience japonaise Kamland confirme les résultats de l’expérience SNO et Super kamiokandé a aussi prouvé que les neutrinos sont massifs bien qu’on ne mesure que la différence de masse et non pas les masses en absolu.

Aujourd’hui, il n’existe pas de "preuve" directe de l’oscillation des neutrinos

Et c’est là que l’on revient à l’expérience OPERA qui a justement pour but de démontrer qu’une partie des neutrinos muoniques oscillent durant les 2,5 millisecondes de leur parcours d'environ 730 kilomètres et deviennent des neutrinos tau.

En Juin 2010, après trois ans d’enregistrements, les chercheurs d’OPERA ont fini par observer une réaction convaincante avec l’apparition d’une particule tau pouvant découler du phénomène d’oscillation des neutrinos mais ce résultat demande à être confirmé.

L’expérience se poursuit donc et c’est en mesurant la durée de ce parcours que les chercheurs d’OPERA sont tombés en septembre 2011 sur l’anomalie aujourd’hui objet de vérification de neutrinos supraluminiques qui bouleverserait les fondements même de la théorie de la relativité.

Les neutrinos n’ont donc pas fini de jouer les facétieux avec les savants !

N’y a-t-il pas meilleure illustration pour les définir que l’oxymore de Corneille dans le Cid "cette obscure clarté qui tombe des étoiles" comme conclut Daniel Vignaud dans sa conférence.


Patrice Leterrier 

12 Mars 2012

 

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9 mars 2012 5 09 /03 /mars /2012 22:21

Alpha.jpg

E 

n 1927, l’université de Cambridge compte parmi ses étudiants un certain Paul Adrien Maurice Dirac.

Il est le fils de Charles Dirac dont la famille est originaire du petit village de Dirac en Charente.

Ce jeune homme gauche, timide mais incroyablement brillant n’a alors que 25 ans.

Il a l’intime conviction que toute loi physique fondamentale doit avoir une beauté mathématique.

Il cherche avec acharnement celle qui permettrait de faire la synthèse des lois de la mécanique quantique et celles de la relativité restreinte.

Il parvint, en 1928, à modéliser une équation unique qui décrit ce qu'il se passe au cœur d'une particule atomique se déplaçant à une vitesse proche de celle de la lumière.

Mais son équation à deux solutions dont une décrit les particules élémentaires mais l’autre des particules identiques en tout point sauf la charge électrique.

L’électron, la plus élémentaire des particules, aurait donc un double dont Dirac prévoit l’existence en 1931 et qu’il appelle positron.

Et l’incroyable se produit !

A peine un an après, le physicien américain Carl David Anderson, alors âgé de 26 ans, découvre, sur les photographies de sa chambre à brouillard, la trace d’une particule ayant les mêmes caractéristiques que l’électron mais déviée en sens inverse par un champ magnétique : le positron de Paul Dirac est observée après qu’elle ait été prédit par son génie.

Depuis Matière et antimatière font fantasmer les chercheurs et les amateurs de sciences fictions.

Certains auteurs sont allés jusqu’à imaginer des anti-univers déroulant le même film en quelque sorte à l’envers que celui de l’univers.

Mais, si Andreï Sakharov a raison, toute l’antimatière aurait disparu à l’origine c'est-à-dire au moment du big bang et l’univers n’existerait qu’à cause d’une légère dissymétrie entre la matière et l’antimatière.

Petite cause grand effet puisque ce serait cette légère différence qui ferait qu’il existe quelque chose vulgairement appelé l’univers plutôt que rien !

La revue Nature du 7 mars 2012 publie une communication de la collaboration Alpha du laboratoire européen de physique nucléaire implantée au CERN de Genève.

Elle relate ses derniers progrès dans l’étude de l’antimatière.

Moins médiatique et beaucoup plus prudent dans ses déclaration que ses collègues de la collaboration Opéra - dont on se souvient des annonces tonitruantes de neutrinos soi-disant supraluminiques - , Jeffrey Hangst, porte-parole de la collaboration ALPHA déclare sobrement "Nous avons prouvé que nous pouvons sonder la structure interne de l’atome d’antihydrogène" 

Dans son émission Science publique, Michel Alberganti Journaliste scientifique assisté de Dominique Leglu directrice de la rédaction de Sciences et Avenir interrogent Etienne Klein physicien au CEA, professeur à l’Ecole centrale à Paris, Niels Madsen membre de l’équipe Alpha et Michel Spiro président du conseil du CERN sur ce que peut nous apprendre l’antimatière.

Leurs réponses à la fois passionnantes et fascinantes donnent un peu le vertige tant de si faibles quantités d’antihydrogène fabriquées à des températures si proche du zéro absolue et suspendues dans le vide peuvent être porteuses de tant d’espoir dans la compréhension du pourquoi l’univers existe.

Ce pourquoi, qui n’a rien de métaphysique, fait partie d’un des trois grands mystères de l’univers (l’absence antimatière, l’existence de la matière noire et l’existence d’une énergie du vide) sur lesquels les scientifiques butent encore.

On se prendrait à rêver sur les possibilités vertigineuses que pourraient offrir cette antimatière si Niels Madsen ne nous ramenait vite à la raison en précisant qu’il faudrait une durée équivalente à vingt fois la vie de l’univers pour fabriquer un gramme d’antimatière.

"Désormais qu’il est possible de concevoir des expériences permettant de mesurer avec précision des antiatomes" affirme le porte-parole d’Alpha.

Quel merveilleux roman policier dont on attend avec impatience les rebondissements et qui nous plonge, en quelque sorte, dans l’instant initial de l’univers si ce terme à un sens.


Patrice Leterrier 

9 Mars 2012

 

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5 mars 2012 1 05 /03 /mars /2012 19:23

brain400.jpg


O

n dit que lorsque le sage montre la lune, le sot regarde le doigt. La maxime est à prendre avec précaution car le doigt du sage exprime peut-être un sentiment ou renforce son discours et il n’est pas forcément si stupide de regarder d’abord le doigt avant d’obéir à l’injonction de celui qui sait.

Aujourd’hui des savants, qui n’ont aucune prétention à la sagesse, regardent la lune pour mieux y voir la terre.

L’idée est apparemment farfelue sauf que cette façon indirecte de regarder le reflet de notre planète pourrait nous apprendre à mieux ausculter des exoplanètes et déceler ainsi les traces d’une possible vie sur l’une des milliards d’exoplanètes qui peuplent l’univers.

Tôt ou tard ils découvriront les traces de formes de vie intelligente dont il est sans importance de fantasmer sur un anthropomorphisme quelconque et une "rencontre de troisième type".

Elles ne seront que les signatures, les tags indélébiles de mondes disparus depuis des millions d'années.

Peut-être que nous déchiffrerons les messages qu’ils auraient pu avoir laissé dans l’immensité vertigineuse qui ne cesse de s’étendre et, encore moins probable, peut-être que ces messages nous donneront les clés de la sagesse.

Sans attendre ce jour béni mais hautement hypothétique, les savants continuent de déchiffrer les mécanismes subtils et complexes de notre cerveau en commençant souvent par celui des rats.

Michel Alberganti sur son blog globule et télescope rapporte les expériences faites sur des muridés équipés d’une interface cerveau-machine qui démontre que ces petits rongeurs sont capables, après un court apprentissage, de commander par la pensée l’obtention de nourriture.

L’expérience est  à la fois passionnante et terrifiante. C’est une preuve de plus que l’interface entre l’homme et la machine va devenir tellement intégré qu’il sera, dans un avenir pas si lointain, impossible de faire la distinction entre l’homme et des outils multipliant ses capacité physiques et cognitives ou ses prothèses d’organes absents, perdus ou inopérants.

On se réjouit bien sûr des perspectives pour les para ou tétraplégiques, les aveugles, les sourds et d’autres handicapés ou malades chroniques qui pourraient ainsi accéder à une autre vie dans l’ère pas si lointaine de la post ou trans humanité.

Ces avancées spectaculaires des nanotechnologies, de la biocybernétique, des neurosciences,... rendent indispensable et urgentissime le rétablissement d’une vraie dialectique entre la science et l’éthique, le comment et la finalité.

Elles ouvrent des perspectives terrifiantes si l’éthique ne reprend pas la place qu’elle doit avoir en démocratie au risque d’engendrer une sous humanité.

Hélas les crêpages de chignons auxquels nous assistons de la part des prétendants à la magistrature suprême sont juste dignes (et encore) de cours de récréations de maternelles  et bien loin des enjeux que la science ne fait que proposer à la société.

Je frémis à l’idée farfelue (quoique le bourrage de crâne ça existe déjà…) d’un dispositif conditionnant notre comportement à des impulsions électriques dans notre cerveau et dont les entrées seraient les discours politiques actuels.

On arriverait sûrement à un taux d’abêtissement généralisé des populations qui est déjà largement entamé avec le triomphe de la médiacratie qui monte en épingle le moindre chahut inévitable face aux provocations ou encore le sujet hautement important de savoir la façon dont les animaux sont abattus avant d’être consommés…..

Il est vrai qu’une société qui compte 8 millions de pauvres n’a rien d’autre à faire que de discourir sur des sujets qui divisent un peu plus les français et qui visent à illustrer, à contresens, la phrase de Jean-Paul Sartre "l’enfer c’est les autres"


Patrice Leterrier 

5 Mars 2012

 

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28 février 2012 2 28 /02 /février /2012 19:30

bayard.jpg

T

oute personne ayant usé ses fonds de culottes sur les durs bancs pleins d’échardes de l’école publique française répond immédiatement et triomphalement 1515 et bon nombre ajouteront fièrement qu’il s’agissait de la première victoire du jeune roi François 1er !

Les choses se compliquent si on a la curiosité de s’intéresser à la date complète (13 et 14 Septembre 1515), encore un peu si on ne se contente pas de savoir que Marignan était en Italie mais qu’on veuille préciser à une quinzaine de kilomètres de Milan.

Je ne suis pas sûr que beaucoup se souviennent que les armées françaises étaient composées de gascons et de navarrais mais également de mercenaires allemands et hollandais et étaient les alliés des troupes vénitiennes qui jouèrent un rôle décisif dans la victoire.

Qui se souvient aussi que nos ennemis n’étaient pas des italiens mais des suisses à la redoutable réputation d’invincibilité ?

Si je cite cet événement historique c’est pour illustrer que, depuis que Gutenberg a rendu accessible l’histoire au plus grand nombre, la mémoire humaine fonctionne en tiroir et sollicite depuis longtemps l’aide de la documentation pour satisfaire notre curiosité naturelle ou des besoins plus ou moins laborieux d’écoliers.

La différence c’est que de nos jours en un clic, j’ai pu rassembler les détails qui avaient, pour la plupart, disparu de ma mémoire.

Je n’avais retenu que 1515 et l’image d’Epinal, sans doute légendaire, d’un François 1er adoubé chevalier par Pierre Terrail le vieux seigneur de Bayard, le chevalier sans peur et sans reproche.

Cette facilité que Google et autres moteurs de recherche apporte entraine-t-elle une modification de nos capacités cognitives ?

L’étude faite par Betsy Sparrow de l’université de Columbia semble démontrer qu’elle provoque en tout cas un changement de comportement et que nous faisons moins d’effort pour nous souvenir lorsque nous savons que nous pourrons retrouver l’information sur internet.

C’était probablement aussi le cas lorsque nous savions dans quel livre et quel chapitre nous pourrions accéder à des détails sur tels ou tels faits que nous voulions retenir.

La différence est dans l’étendue presqu’infinie des informations disponibles et la facilité d’y accéder incluant le fait que nous n’avons plus besoin de nous souvenir de l’ouvrage, de la page ni même de l’auteur mais simplement que nous savons qu’il existe une référence quelque part sur internet concernant ce sujet.

On peut même se dispenser de ce souvenir et retenir seulement qu’il faut deux ou trois clics pour aboutir à une liste d’informations pertinentes sur le sujet choisi.

Nous y gagnons de la place dans notre mémoire mais nous y perdons l’effort de la réminiscence, l’obligation de nous rendre dans une bibliothèque et l’exercice de monter et descendre les volumes parfois lourds qu’il fallait consulter.

A cette capacité presque sans limite d’accès à une mmense mémoire collective, s’ajoute la possibilité de conserver la trace des événements personnels que nous oublions avec autant de facilité.

Certains vont jusqu’à y voir la préfiguration d’une "mémoire parfaite" puisque nous pourrions suivre minute par minute tous les événements de notre vie, l’endroit où nous nous trouvions, notre pression artérielle, notre pouls, les paysages que nous voyons, etc.

Nous vivons déjà les effets secondaires des prothèses mnésiques que sont les assistants en tout genre et l’internet.

Par exemple la perte totale de symbolique des vœux d’anniversaire puisqu’ils résultent simplement d’un "reminder" sur un Iphone, un agenda électronique ou une page facebook. 

La perspective d’une mémoire dite "parfaite" est presque aussi terrifiante que celle de pouvoir disposer d’une pilule effaçant les souvenirs de notre mémoire.

Nancy Huston développe avec talent dans son livre l’espèce fabulatrice, la thèse que nous construisons en permanence la fable de notre vie qui est faite d’une sélection sans cesse actualisée non pas de faits mémorisés et figés mais d’une savante recombinaison de nos souvenirs, de nos capacités cognitives et de nos émotions du moment.

Il est heureux que nous puissions naturellement gommer des événements sans importance et mieux encore atténuer progressivement les cicatrices des épreuves que nous subissons.

Et puis s’il n’y avait plus d’effort de mémoire à faire, nous n’aurions même pas la curiosité de relier le fameux 1515 à quoi que ce soit et finalement je n’aurais pas pu vous importuner avec mes réflexions saugrenues.


Patrice Leterrier 

28 fevrier 2012

 

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25 février 2012 6 25 /02 /février /2012 13:59

neutrinos.jpg


G

rosse bourde possible des chercheurs du programme OPERA qui avaient annoncé en septembre dernier la nouvelle sensationnelle de neutrinos plus rapides que la lumière !

On se souvient qu’ils ébranlaient ainsi l’un des piliers de la théorie de la relativité qui, dans le même temps, trouvait une confirmation bien plus confidentielle avec la vérification du décalage vers le rouge de la lumière des galaxies dû à la gravité faite par Radek Wojtak et ses collègues de l’Université de Copenhague.

La nouvelle de la mesure potentiellement erronée de la vitesse des neutrinos est annoncée d’abord dans la revue Science.

Elle doit sans doute faire jubiler nos amis américains jaloux d’être surpassés par le LHC et la fermeture du Tevatron, l’accélérateur du Fermilab.

Deux sources possibles d’erreurs ont été détectées : D’une part une dérive d’une ampleur inconnue de l’oscillateur censé synchroniser les signaux GPS et d’autre part un possible problème de connexion de la fibre optique de 8 km reliant un GPS à la carte électronique du détecteur OPERA.

Dans le même temps, des chercheurs du Fermilab viennent de publier une nouvelle mesure de la masse du boson W avec une précision jamais atteinte auparavant qui permettra peut-être de faciliter la recherche du fantomatique boson de Higgs qui continue à se cacher malgré les efforts incessants des chercheurs du LHC.

Aujourd’hui si on tape "neutrinos vitesse de la lumière" sur google on obtient 15 900 résultats alors que "masse boson W" n'en donne que 4 et "découverte boson de higgs" en donne 9!

On voit le rôle d'amplificateur exponentiel d'internet qui semble directement lié au caractère sensationnel d'une découverte.

La course à l’événement en vogue aujourd’hui semble faire oublier aux scientifiques leur déontologie et la rigueur de l'approche scientifique qui veut qu'une expérience unique qui contredit une théorie largement confirmée par ailleurs doit être méticuleusement vérifiée et revérifiée avant que l’on se lance dans des supputations certes porteuses d’audience mais qui risquent d’être très vite contredites.

En septembre 2011, le porte parole d’OPERA, Antonio Ereditato, de l’Université de Berne (Suisse), déclarait triomphant sur le site du Cern : "après des mois d’études et de recoupements, nous n’avons découvert aucun effet dû aux instruments qui pourrait expliquer le résultat de la mesure." 

Il ajoutait, comme une forme de défi au monde scientifique "Les chercheurs de la collaboration OPERA vont poursuivre leurs études, mais nous attendons également avec impatience des mesures indépendantes qui permettront d'évaluer pleinement la nature de cette observation."

Il est troublant de constater que "malgré des mois d’études et de recoupements" la dérive possible d’un oscillateur et une mauvaise connexion entre un GPS et un ordinateur n’aient pas été décelées avant !

Nul doute que les antisciences toujours à l’affut de la moindre faute profiteront de cette bourde, qu’elle soit confirmée ou non, pour jeter un peu plus le discrédit sur d’autres résultats comme, au hasard, la source anthropique du réchauffement climatique.

La responsabilité de ce tam-tam assourdissant est partagée entre les scientifiques tellement pressés de faire des annonces et la presse (scientifique ou pas) naturellement toujours à l'affut d'une nouvelle sensationnelle oubliant quelquefois plus ou moins volontairement la vérification scrupuleuse des sources et des attendus souvent prudents mais pas toujours très lisible d'un communiqué scientifique.

La question reste comme toujours "à qui profite le crime" même s'il ne s'agit pas ici de crime et on retrouve en l’occurrence la recherche effrénée d’audience et la course incessante aux crédits des scientifiques!

Attendons donc les nouvelles mesures mais si les erreurs sont confirmées, c’est en quelque sorte dommage puisque ces neutrinos supraluminiques ouvraient de nouvelles voies de recherche.

Entre temps le boson de Higgs sera peut-être démasqué et je suis curieux par avance du nombre de réponse que cette nouvelle donnera sur google.


Patrice Leterrier 

25 février 2012


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21 février 2012 2 21 /02 /février /2012 17:04

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L

e dernier pigeon migrateur américain était une femelle qui s’appelait Martha. Elle est morte le 1er septembre 1914, à 1 heure du matin, au zoo de Cincinnati.

Le nombre d’espèces qui disparaissent ne cesse d’augmenter.

Les prochaines disparitions ne portent pas sur des millénaires mais concernent les décennies à venir.

L’action de l’homme sur son écosystème est redoutable.

La surexploitation des océans, la déforestation massives, la chasse des animaux non seulement pour la viande mais pour le cuir, la fourrure, les dents, les écailles, les plumes ou encore la graisse des baleines pour fabriquer des vêtements, des bijoux ou des produits de cosmétique menacent des milliers d’espèces.

Nous nous apprêtons à vivre dans un monde ou le beluga, le bonobo, le gorille des montagnes, l’ours polaire, le tigre de Sumatra, le rhinocéros et bien d’autres rejoindront le dronte de Maurice (plus connu sous le nom de Dodo) disparut à la fin du 17ème siècle et le dauphin de Chine déclaré disparut en 2007.

Nous sommes plus de 7 milliards d’humains et nous sommes capables grâce à nos technologies non seulement d’aller explorer l’espace, de  rallonger sans cesse l’espérance de vie de nos semblables, d’éradiquer des maladies, de faire des miracles pour réparer nos corps mais hélas également de laisser plus d’un milliard d’êtres humains victimes de la faim et de modifier aveuglement notre écosystème.

Nous sommes responsables de la disparition du pigeon migrateur américain, du dauphin de Chine et de plein d’autres espèces mais aussi du trou dans la couche d’ozone qui nous protège et nous brûlons des milliards de tonnes de combustibles fossiles en rejetant des milliards de mètres cubes de CO2 dans l’atmosphère.

Personne de scientifiquement sérieux ne peut nier que le réchauffement climatique se fait actuellement à un rythme n’ayant aucune  commune mesure avec un phénomène naturel et personne de vraiment objectif ne peut nier le rôle de l’homme dans ce phénomène (consensus à plus de 97% selon une étude sur la crédibilité des experts climatiques).

Chaque année nous ajoutons une couverture de plus sur le lit déjà assez chaud de notre planète et la question qui reste ouverte est uniquement de savoir combien de temps cela prendra-t-il pour dérégler irrémédiablement le climat qui se trouve – chacun peut le constater – déjà bien perturbé ?

Bien sûr vous pouvez trouver sur internet et dans des publications pseudo-scientifiques des picoreurs de chiffres qui se livrent à des tours de passe passe pour nier ces faits avérés.

Vous pouvez aussi trouver des écrits qui nient la théorie de l’évolution, qui annoncent la fin du monde proche, qui prétendent que le 11 Septembre est l’œuvre d’un complot, que l’homme n’a jamais mis les pieds sur la lune, etc…

Il n’empêche que la démarche scientifique consiste toujours à trouver les explications qui collent le mieux avec les faits constatés et que, jusqu’à preuve du contraire, c’est cela qu’on appelle la vérité scientifique.

A l’épreuve de la démarche scientifique rien d’autre que l’action de l’homme ne peut expliquer le brutal et constant réchauffement de la planète que nous observons aujourd’hui.

Bernard Baruch disait "Tout homme a le droit d’avoir son opinion mais aucun homme n’a le droit de se tromper sur les faits qu’il rapporte".

Alors les exégèses sur la forme de telle ou telle courbe de températures, qui échauffent le web, seraient franchement ridicules si elles n’étaient le prétexte à discréditer l’approche des spécialistes du climat et à semer le doute dans l’esprit du public.


Patrice Leterrier 

21 février 2012

 

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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 18:42

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eut-être avez-vous en mémoire un souvenir de votre prime jeunesse dont vous ne savez plus s’il est la trace de votre vécu ou la réminiscence bien arrimée d’événements que l’on vous a tellement racontés dans votre enfance que vous avez fini par vous l’approprier comme un souvenir personnel ?

Après les attentats du 11 septembre, une équipe de psychologues, dirigée par William Hirst et Elizabeth A. Phelps, a interrogé plusieurs centaines de personnes sur leurs souvenirs de cette terrible journée.

Un an après le terrible événement, plus d’un tiers des personnes interrogées avait modifié leur récit de leurs souvenirs de ce drame.

Mieux encore, 3 ans après, ils étaient plus de la moitié à changer de version et certains avaient même modifié l’endroit où ils se trouvaient au moment des faits.

Bien sûr, on connaissait depuis longtemps le caractère subjectif des témoignages qui peuvent fluctuer de façon considérable d’une personne à une autre, mais il était plus ou moins admis que les souvenirs, notamment ceux chargés d’un forte composante émotionnelle, s’imprimaient de manière presqu’indélébile dans notre mémoire justifiant l’expression "je m’en souviens comme si c’était hier !".

Les découvertes faites par Karim Nader, Glenn Shafe et Joseph LeDoux ont montré qu’en fait les souvenirs ne sont pas stockés comme dans un ordinateur sur une mémoire statique en charge de les retenir mais reconstruits chaque fois que nous les rappelons et que cette reconstruction modifie en retour les éléments dispersés dans le cerveau qui ont conduits à évoquer le souvenir.

Nous modifions inconsciemment nos souvenirs en les rappelant notamment parce que les conditions dans lesquelles se manifestent le souvenir n’ont plus grand-chose à voir (et c’est souvent heureux) avec celles qui prévalaient au moment où nous avons vécu l’événement.

Cette découverte n’expliquerait pas le mécanisme de fabrication du souvenir si Todd C. Sacktor,Professeur de physiologie, de pharmacologie et de neurologie au Sunny Dowstate Medical Center de New York n’avait découvert que la protéine kinase C appelé PKMzeta jouait un rôle fondamental dans la fabrication des souvenirs.

Plus encore, dans des expériences menées sur les rats, T. Sacktor et ses collègues ont réussi à renforcer ou au contraire à effacer le souvenir d’expériences en stimulant ou au contraire en inhibant l’effet de cette protéine.

Ce qui paraît le plus fascinant dans les travaux des chercheurs c’est cette capacité d’effacer des souvenirs (en l’occurrence désagréables pour les muridés) par simple inhibition de la protéine PKMzeta.

Cette découverte laisse entrevoir des espoirs thérapeutiques pour le traitement de personnes victimes de chocs post-traumatiques mais également pour d’autres pathologies comme les troubles obsessionnels compulsifs ou encore les toxicomanies largement alimentées par des souvenirs envahissants.

On peut aussi frémir d’effroi en imaginant un monde où les individus ne pourraient plus disposer librement de leurs souvenirs.

Bien sûr on est encore loin des expériences de laboratoire à des pilules "effaceuses" de la mémoire mais une fois de plus on voit que la dimension éthique est indissociable de la recherche scientifique.


Patrice Leterrier 

20 février 2012

 

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17 février 2012 5 17 /02 /février /2012 17:12

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e jeudi 6 mai 2010 à 14h42 le Down Jones a sombré de 600 points en moins de 6 minutes.

C’était la plus forte chute de cet indice depuis 114 ans.

Ce "flash crash" n’a pas duré puisqu’à 15h07, l’indice a rebondi mais une étude publiée le 7 février sur arXiv montre que ces événements ne sont pas si rare même s’ils arrivent et disparaissent à des vitesses telles qu’ils passent en général inaperçus bien qu’ils présentent un risque potentiel énorme pour la stabilité des marchés.

L'analyse, milliseconde par milliseconde de cinq ans de données boursières entre 2006 et 2011, montre que les échanges informatisés se produisent si rapidement qu’ils échappent complètement au contrôle humain.

Pas moins de 18 520 accidents ont eu lieu sur la période étudiée selon l’étude.

L’informatisation à outrance des marchés financiers a créé un monde ou l’unité de temps est la nanoseconde et dont le comportement échappe aux concepteurs des algorithmes de plus en plus savants qui sont censés réguler les marchés financiers.

"Il y a tout un monde invisible vivant au rythme de 650 millisecondes. Le découvrir c’est comme un atterrissage sur une autre planète", a déclaré Neil Johnson, un spécialiste des systèmes complexes à l'Université de Miami et co-auteur de l'étude, "C'est une énorme partie du marché qui est hors de la portée humaine et nous n’avons qu’un aperçu du genre d'écologie qui y règne".

Littéralement le marché est devenu autonome et incontrôlable puisque les transactions que déclenchent les cathédrales algorithmiques construites par les experts vivent dans un espace temps inaccessible à l’homme.

Bien sûr les analystes se plongent sur ces résultats pour essayer de trouver les raisons de ces accidents et surtout mettre en place des "disjoncteurs" permettant de mettre le marché réel à l’abri des accidents du marché souterrain des algorithmes.

Mais la question qu’ils posent n’est-elle pas celle qui est au cœur de la réflexion sur ce que certains appellent la post-humanité ?

Des philosophes réfléchissent sur le risque qu’homo sapiens - qu’Henri Bergson appelait pertinemment homo faber – ne devienne que le chainon historique d’une société dominée par les systèmes mises en place par l’homme.

Ne peut-on pas se demander si ce moment n’est pas déjà arrivé en matière de marchés financiers ?

N’est-il pas significatif que les chercheurs ne cherchent plus à "comprendre" pourquoi les systèmes dysfonctionnent pour y remédier mais envisagent plutôt de contrôler le "comportement" du système constitué par le réseau inextricable des superordinateurs prenant des microdécisions sans intervention humaine et envisagent les moyens de déconnecter ce système lorsqu’il se met à avoir des comportements inattendus et en apparence incohérents.

Combien de temps pourront-ils encore garder la main sur l’immense pieuvre qu’ils ont collectivement mise en place sans véritablement réfléchir à l’architecture globale du système et la possibilité de le contrôler globalement ?

A quel moment l’assistance, mise en place par l’homme pour l’aider à prendre des décisions, se substituera à lui sans qu’il puisse même intervenir ?

Le problème n’est pas si abstrait qu’il n’y parait et d’autres domaines comme par exemple l’assistance médicale à la survie, la microchirurgie cérébrale, la conduite d’avion de chasse en situation extrême sont déjà largement dominés par des appareillages fonctionnant sur une base temporelle et/ou spatiale inaccessible à l’homme.


Patrice Leterrier 

17 février 2012

 

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