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17 janvier 2013 4 17 /01 /janvier /2013 15:57

 

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A

 

aron Swartz a mis fin à ses jours à l'âge de 26 ans.

Ce jeune prodige du Web, qui avait participé à l’invention des flux RSS alors qu'il n'avait que 14 ans, avait fait du libre accès sur internet son combat.

La mise en ligne de l’intégralité des 4,8 millions d'articles scientifiques du site JSTOR lui avait valu une mise en examen en 2012. Il risquait jusqu’à 35 ans de prison et un million de dollars d’amende.   

Il serait assez indécent de prendre le corps d'Aaron Swartz en otage même de la cause qu'il défendait par la révolte.

Cet hyperactif souffrait de dépression et son suicide est une affaire personnelle qui ne peut être revendiquée par personne même si son combat doit continuer pour permettre un plus libre accès aux publications scientifiques.

Les pétitions des chercheurs contre les pratiques commerciales du groupe Elsevier et d'autres mouvements d'universitaires montrent que son action n'a pas été vaine même si le chemin à parcourir sera long et semé d’embuches.

Les chercheurs sont trop souvent prisonniers d’un impossible équilibre entre recherche et course à la publication.

Les universitaires subissent une sorte de "double peine" de la part des sociétés d’éditions qui publient les articles en ne rémunérant ni les auteurs ni les relecteurs et en faisant payer l’accès.

Au-delà de ce problème de l’accès libre aux publications scientifiques, se pose un problème d’équilibre délicat avec la protection de la propriété intellectuelle.

Ce droit à l’accès à la connaissance pourrait prendre la forme d’une annexe de la déclaration universelle des droits de l'homme, comme celle que réclame Tim Berners Lee pour le droit à l’accès à internet.

Reste à définir les règles à appliquer car malgré tout, et même si leurs abus sont condamnables, les éditeurs comme Jstor, Elsevier et d’autres ont besoin de financer leur activités.

Comment accepter qu’elles ne puissent recourir qu’aux mannes des annonceurs qui auraient alors une sorte de pouvoir sur le contenu des publications ?

Dans son manifeste, Aaron Swartz écrit "la justice ne consiste pas à se soumettre à des lois injustes".

C'est clairement un appel à la désobéissance civique qui montre la limite entre la revendication et la position de hors la loi qui ne peut que tomber sous le coup de la loi dans un état de droit même quand on prend la posture de Robin des bois comme le regretté Aaron Swartz.

Les investissements en recherche constituent de plus en plus des actifs stratégiques dont dépend souvent la survie des entreprises.

Les citoyens financent les recherches publiques qui contribuent aussi à la compétitivité d’un état.

Elles conditionnent donc indirectement leurs conditions de vie.

Leurs résultats doivent-ils être rendus en libre accès, sans contrepartie au nom du droit à l’accès à la connaissance ?

Peut-on extraire la science et ces publications des conditions économiques dans lesquelles elles se développent ?

Personne de sérieux ne voudrait voir disparaître la notion de propriété intellectuelle, de la protection des innovations par les brevets même si certains pays les pillent régulièrement et sans complexe.

Pourquoi certaines publications qui débouchent sur des avancées technologiques majeures devraient-elles être en libre accès alors qu’elles peuvent conditionner la création d’emplois dans les pays industrialisés qui consacrent des sommes respectables à la recherche et qui ne peuvent concurrencer des pays où les droits des travailleurs et des enfants ne sont pas, et de loin, au même niveau ?

Il y a probablement une différence importante entre ce qui relève du domaine public, qui devrait être accessible par tout le monde et partout et ce qui relève de propriété intellectuelle (état, université, entreprise ou particulier) et qui mérite d’être protégé d’un pillage qui, s’il n’est pas "moralement équivalent à l’abordage d’un vaisseau et au meurtre de son équipage", n’en reste pas moins un acte délictueux.

wiki.partipirate.org cite le Dalaï-lama en hommage à Aaron Swartz : "Share your knowledge, that is the only way to achieve immortality"

Belle vision humaniste qui se heurte tout de même au mur de la réalité de la compétition qui fait de plus en plus de la connaissance et du savoir-faire le principal pilier de la survie des entreprises et des états dits développés.


Patrice Leterrier

17 janvier 2013

 

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9 janvier 2013 3 09 /01 /janvier /2013 17:20

 

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J

 

e ne souviens de ma perplexité quand des grandes personnes, qui s’appellent entre elles des adultes, soutenaient devant mes yeux incrédules de sentencieuses maximes, persuadées qu’elles semblaient être que leur taille par rapport à la mienne et que la présence de nombreuses traces du temps sur leur personne suffisaient à garantir l’infaillibilité de leurs propos.

Parmi ces nombreuses affirmations ne souffrant le moindre questionnement de notre part il y avait cette stupide formule "La curiosité est un vilain défaut".

Comment peut-on affirmer une telle absurdité dès lors que l’enfant se construit d’autant mieux qu’il sait se montrer curieux de tout en toute circonstance ? 

Il n’y avait donc pas de meilleur choix possible pour le nom du robot envoyé sur Mars par la NASA que Curiosity.

Mais curiosité n’est pas synonyme d’impatience et lorsque l’on suit les communications de l’agence américaine et les commentaires qu’elles suscitent, on est bien obligé de constater que la patience n'est décidément pas une vertu de journaliste.

Dernier exemple en date, le buzz autour d’une supposée fleur découverte sur Mars malgré le démenti prudent de la NASA.

L’histoire de cette fausse "fleur" est symptomatique de notre croyance que toute forme de vie devrait se rapprocher d’une forme existante sur la terre.

L'objectif ultime de Curiosity reste d'explorer les pentes du mont Sharp.

La mission devait durer une année martienne au moins soit pas loin de deux années.

Bien sûr, les scientifiques scrutent chaque image envoyée par le robot, chaque mesure qu’il effectue sur son lent chemin vers son but final.

Il n’a parcouru actuellement qu’un peu plus de 20% de son parcours.

Bien sûr aussi, que tout au long de son parcours des surprises sont possibles.

Mais il n'est pas exclu que finalement Curiosity ne découvre rien et que la planète rouge garde ses secrets.

Cette "découverte" pour décevante qu’elle puisse être ne serait pas sans intérêt.

Pendant qu’on cherche sur Mars, peut-être un jour sur Europe (le satellite de Jupiter pas le continent sur lequel les traces de vies sont encore réelles même si l’organisation politique de ces représentants laisse à désirer), on apprend cette étonnante nouvelle annoncée par François Fressin du Centre d'Astrophysique de l'Université de Harvard.

Selon ce respectable astrophysicien français, il n’existerait pas moins de 17 milliards de planètes de taille terrestre dans la seule voie lactée qui n’est pourtant qu’une infime partie, malgré son importance pour nous, de l'univers.

Cette nouvelle n’est en fait pas si étonnante que ça si on raisonne sans ce stupide à priori anthropomorphique qui nous pousse à nous croire unique dans l’univers.

Au sein de cette multitude immense ou ailleurs dans l’univers, il y a sûrement - non pas des petits hommes verts chers aux auteurs de science fiction ni même des ET, frappés du péché originel d'anthropomorphisme primaire - mais des formes d'organisation "biologique".

Elles ne sont pas forcément basées sur le carbone ni sur la double hélice de l'ADN.

On peut à peine imaginer le niveau de complexité ni la forme d'"intelligence" qui s'y serait développée ni d'ailleurs le paramètre espace/temps de cet "accident", parfaitement furtif comme celui sur la terre, dans l'immense silence de l'univers.

Il est largement probable qu’une découverte de ce type se fasse un jour parmi les milliards de planètes habitables.

Il est non moins évident qu’il y a peu pour ne pas dire pas du tout de chance qu’elle se situe dans un espace/temps compatible avec le moindre contact et qu’il ne s’agisse que de traces fossiles, ce qui ne diminuerait pas l’importance d’une telle découverte.

En attendons profitons sans retenu des splendides images envoyées par Curiosity qui resteront quoiqu’il arrive un témoignage de l’extraordinaire capacité technologique de l’homme.


Patrice Leterrier

9 janvier 2013

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5 janvier 2013 6 05 /01 /janvier /2013 13:35

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P

ourquoi est-il possible, d’une certaine façon presque valorisant, de pouvoir déclarer en société qu’on est nul en science sans paraître pour le dernier des incultes, voire au contraire pour revendiquer ostentatoirement une culture générale encyclopédique ?

La culture générale serait-elle plus noble lorsqu’il s’agit de parler savamment de l’art de la fugue chez Bach, du style littéraire de Marcel Proust, des arabesques sublimes d’un Roudolf Noureev, de l’univers onirique d’un Charles Baudelaire et sans valeur "culturelle" lorsqu’il s’agit du principe d’incertitude de Heisenberg, de la théorie du big bang ou de la reproduction des orchidées ?

L’article publié par the Telegraph intitulé "Knowing about science is not a trivial pursuit(la connaissance scientifique n’est pas un jeu de trivial poursuite)" est emblématique du rôle incontestable de nos jours de la science dans la culture alors qu’on a trop souvent le snobisme de les opposer.

Aujourd’hui, où la science et la technologie envahissent littéralement notre environnement, comment pouvons nous rester dans la contemplation des choses, dans l’utilisation de tous ces objets qu’elles nous offrent, à profiter des progrès incessants de la médecine  sans chercher à comprendre un peu ce qui se cache sous l’apparence magique des choses ?

J’aime assez cette idée de Richard Feynman que la connaissance de l’anatomie détaillée d’une fleur n’enlève rien au contraire au plaisir de la contempler même lorsque l’instant est éphémère comme pour la rose que Ronsard, éconduit par une jeune femme, associait à la fragilité de la beauté féminine.

En conclusion de son article l’auteur Tom shiver écrit "Il ya un monde magnifique et important sous la surface de tout ce que nous appelons art, et si vous n’avez pas la moindre idée de ce dont il s'agit, vous ne voyez qu'une infime partie de l’œuvre".

Il n’est certes pas nécessaire d’être botaniste ou biologiste pour apprécier l’élégance et le parfum d’une fleur mais pourquoi les connaissances de l’un ou de l’autre seraient-elle un frein au plaisir esthétique ?

Faut-il d’ailleurs que les grands découvreurs de la science aient eu une imagination fertile, un sens artistique inné, une puissance créatrice de premier ordre pour dénicher derrière les apparences les secrets de l’univers.

Le grand collisionneur de Hadrons qui a permis la découverte probable du fameux boson de Higgs a maintenant fermé ses portes jusqu’en 2015 pour maintenance.

Il a totalisé la bagatelle de 6 millions de milliards de milliards de collisions entre protons et a permis d’accumuler pas  moins de 60 péta octets de données.

Il a aussi fourni de superbes images de ces furtifs moments où la matière se dévoile en toute impudeur et dans sa plus fine intimité aux savants.

A l’autre extrémité de la quête de connaissance, on peut aussi admirer les images obtenues par les radiotéléscopes d’ALMA situés dans le désert chilien d’Atacama d’"un bébé planète nourri au biberon stellaire" pour se convaincre qu’art et science sont décidément inséparables.

La disparition en Chine de 80 % des récifs coralliens en 30 ans nous prive d’une merveilleuse diversité d’êtres vivants dont on ne se lasse pas d’admirer la beauté.

Comment douter de la subtile familiarité des mathématiques avec l’art en voyant les images de fractales exposées au Bard Graduate Center à Manhattan par l’historienne d’art Nina Samuel qui a passé deux semaines à interviewé Benoît Mandelbrot en 2008 ?

On pourrait poursuivre à l’infini cet énoncé de la connivence entre la nature visible ou cachée et l’art.

Alors devant tant de manifestations de l’indispensable rôle des scientifiques pour nous faire découvrir non seulement le fonctionnement de toute chose dans l’univers mais également son insondable beauté, n’est-il pas temps de revenir à cette vision du temps de Thalès, de Pythagore et d'Aristote, où la science, l’art et la philosophie étaient indissociables du "savoir de toute chose dans la simplicité" ?


Patrice Leterrier 

5 janvier 2013

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31 décembre 2012 1 31 /12 /décembre /2012 15:10

Curiosity.jpg

P

uisqu’il ne s’est rien passé le 21 décembre, chacun retourne à la bonne vieille habitude de regarder dans le rétroviseur les événements qui ont marqué l’année 2012.

Le compte à rebours a commencé et selon le prisme qui lui est préféré, chacun regarde les événements à travers sa lorgnette.

Si votre vision du kaléidoscope mondial a un tropisme hexagonal exagéré, vous aurez sûrement retenu le résultat des élections présidentielles à l’issue desquelles, le "tout sauf Nicolas Sarkozy", a porté au pouvoir un François Hollande auquel pas un des pronostiqueurs politiques ne donnait la moindre chance un an plus tôt.

Si votre lunette dépasse le simple cadre hexagonal, vous aurez sans doute une pensée particulière pour toutes les victimes de l’incapacité des hommes à régler leurs problèmes par la négociation plutôt que par les armes qu’elles soient syriennes, palestiniennes, afghanes, maliennes ou encore d’ailleurs.  

Si vous êtes passionné de sciences nul doute que la découverte d’une particule pouvant bien être le très recherché boson de Higgs vous aura enthousiasmé.

Si vous aimez le sensationnel et l’exploit inutile, le vertigineux saut de Félix Baumgartner vous aura sans doute ravi.

Si la conquête spatiale est au centre de vos intérêts, vous attendez probablement avec impatience les résultats à venir de la mission de Curiosity.

Si vous vous préoccupez un tant soi peu du sort de la planète vous avez sûrement déploré l’énorme échec des négociations de Doha, preuve supplémentaire de l’aveuglement des politiques face au problème pourtant crucial de l’action de l’homme sur son environnement.

Cette année a été aussi marquée par le jubilée de la Reine Elisabeth, fossile d’un autre temps, et par des jeux paralympiques qui ont presqu’atteints la popularité de ceux des athlètes valides.

Le monde n’entendra plus la voix sublime de Whitney Houston, les coups de gueules de Thierry Roland, les polémiques alimentées par Michel Polac, ni les sublimes improvisations de Dave Brubeck, ni encore le témoignage d’un dernier témoin d’une France qui refuse la fatalité : Raymond Aubrac.

D’aucuns s’appesantiront peut-être sur la dureté des temps, déplorant que les restos du cœur existent encore comme témoignage de notre incapacité à nourrir les plus démunis, certains redouteront probablement les ravages de l’extraordinaire mutation mondiale qui est en train de s’opérer, fragilisant nos économies et détruisant nos emplois.

Devant ces bouleversements la tentation est forte de désigner des coupables, de fustiger tel ou tel groupe social, de montrer du doigt le cynisme de certains, de jeter l’anathème sur le monde de la finance, d’accuser la fatalité qui s’abat sur nous, de renoncer à lutter devant l’inanité de notre action et la faiblesse de nos moyens.

Pourtant la seule attitude qui conduit à un renouveau est celle qui consiste  à affronter sans complexe les épreuves, à faire preuve de cette résilience dont parle Boris Cyrulnik en donnant du sens à sa vie plutôt que de subir et en se projetant résolument dans l’avenir, un avenir qui nous construit parce que nous le remplissons de projets nourris par la "curiosity" et l’enthousiasme.


Bonne année à tous

Patrice Leterrier 

31 décembre 2012

 

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21 décembre 2012 5 21 /12 /décembre /2012 17:57

 

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B

 

on d’accord c’est plus facile de le dire aujourd’hui qu’hier mais voilà au moins un sujet dont on parlera moins : la fin du monde n’a pas eu lieu !

Cette prédiction est à ranger au musée avec la grande terreur de nos ancêtres lorsque que le compteur très arbitraire du temps a franchi le chiffre fatidique du premier millénaire.

Nous sommes bien obligés de constater que la fin du monde devra encore attendre une prochaine collision avec un immense météorite, une gigantesque explosion solaire entrainant l’inversion des pôles, une éruption volcanique cataclysmique, une escalade nucléaire incontrôlable, un virus massivement mortel et sans parade ou, malheureusement plus probable, un dérèglement en spirale du fragile équilibre climatique.

Le jugement dernier ne semble pas donc pour aujourd’hui (bien que la journée ne soit pas complètement terminée) et bien malin celui qui pourrait aujourd’hui l’annoncer.

Il ne fait aucun doute que les plus fanatiques des annonceurs d’apocalypse trouveront une bonne raison au répit apparent obtenu par l’espèce humaine.

Nous pouvons faire confiance à leur imagination pour nous inventer une nouvelle échéance et maintenir ainsi leurs fidèles en haleine.

C’est probablement aussi la fin d’un business lucratif : le succès faramineux du film 2012 qui a rapporté 770 millions de dollars à leurs auteurs, les plus de 300 livres écrits et publiés sur le sujet parmi lesquels des bestsellers, le nombre incroyable d’articles ou d’émissions de télévison, le buzz immense sur internet, les bunkers dont les plus luxueux coûtent la bagatelle de 50 000 $ par place.

La petite commune de Bugarach se serait bien passée de cette eschatologique renommée, de tous ces journalistes et de la protection des forces de gendarmerie.

Le ministre du tourisme mexicain se félicite probablement d’une affluence record dans des sites archéologiques qui n’ont d’ailleurs pas tous pour origine les mayas.

Comment ne pas s’étonner qu’homo Sapiens, chef d’œuvre de raison, de logique implacable, de découvertes scientifiques aussi bien dans l’infiniment petit que dans l’infiniment grand, d’avancées vertigineuses dans le domaine de la santé faisant progresser sans arrêt sa durée de vie, ne puisse s’empêcher de se faire peur sans raison ?

Faut-il rappeler que nous sommes d’abord les descendants d’un lignée de primates qui n’a survécu à tous les dangers qu’en partie parce qu’ils étaient construits pour réagir à la peur avant même de réfléchir aux raisons objectives qui la provoque ?

La sélection naturelle a favorisé ceux qui préféraient craindre un danger même imaginaire à ceux qui s’interrogeaient sur sa rationalité tout simplement parce qu’ils avaient plus de chance de survivre dans un environnement à la fois hostile et mystérieux.

La peur d’un grand malheur d’ordre cosmique nous enlève toute responsabilité individuelle sur le futur et nous apporte paradoxalement une sorte de sérénité intellectuelle.

Cette croyance est à la fois terrifiante et confortable parce qu’il n’y a plus aucune autre raison de s’inquiéter.

Toute notre énergie doit se concentrer sur la préparation : construire un bunker, amasser de la nourriture, etc.

C’est en fait un moyen thérapeutique bien connu contre l’anxiété que de se consacrer à des comportements orientés vers un seul but.

Bien sûr il ne faut pas ignorer que les autorités nous cachaient la vérité pour éviter la panique et que nous sommes face à un immense complot du silence relayé par des scientifiques de mèche avec le pouvoir.

Il faut dire que dans le monde d’aujourd’hui où on ne parle que de terrorismes, de guerres, d’épidémies, de crises de toutes sortes (financières, sociétales, morales, religieuses), de futur incertain face aux changements climatiques et à l’impuissance de la communauté internationale, les gens sont facilement prêts à céder à la panique.

Si cette peur de fin du monde pouvait collectivement nous faire comprendre l’importance de préserver un environnement finalement fragile et si précieux, si la fin d’un long cycle du calendrier mayas pouvait être le début de l’ère de l’harmonie entre l’homme et la nature, nous n’aurions qu’à nous féliciter que les pompeuses pantomimes de pitoyables pythies plastronnant mais piteusement pantoises aient fait couler autant d’encre.

En attendant ces jours meilleurs, préparons nous à fêter la naissance de cet enfant né, parait-il, à Bethléem dont les mayas n’avaient que faire.


Joyeux Noël à tous

Patrice Leterrier

21 décembre 2012

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6 décembre 2012 4 06 /12 /décembre /2012 21:46

 

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U

 

ne scène de la guerre du feu m’horripile particulièrement.

Alors qu’après tout nous n’avons eu qu’à récolter les énormes efforts d’évolution de nos ancêtres qui nous ont légué dans une lutte terrible avec le milieu ce cortex frontal dont nous sommes si fiers, comment ne pas s’indigner de voir nos ancêtres représentés comme des débiles obsédés sexuels qui se jettent sur leurs femelles à la simple vue de leurs arrière-trains.

Nous ne savons rien sur les rituels de séduction de nos ancêtres mais ce que nous savons c’est qu’il nous serait bien difficile de les battre à la chasse.

Ils étaient après tout sûrement aussi bien voire mieux adaptés à leur milieu que nous le sommes.

Certains me feront justement remarquer d’ailleurs que beaucoup de mâles de l’espèce homo sapiens ne sont pas beaucoup plus avancés en termes de sexualité.

Certes l’évolution laisse encore une place prépondérante à notre cerveau reptilien et l’action de la testostérone reste toujours aussi débilitante chez la plupart des hommes qui se comportent souvent comme le pauvre loup de Tex Avery.

Et pourtant l’homme moderne s’est multiplié dans les 100 000 dernières années de sa formidable saga à un rythme incroyable reculant sans cesse l’emprise des maladies et sa durée de vie.

Cette incroyable expansion a donné à l’évolution un champ immense d’expression mais paradoxalement de moins en moins de chance qu’elle ne s’exprime ou plus exactement qu’elle ne se traduise par une sélection naturelle au sens darwinien du terme.

L’aventure d’homo faber devenu maître de son environnement et bientôt de sa destinée génétique par sa technologie n’arrive-t-elle pas à son terme (peut-être pas le 21 décembre 2012) avec ses incroyables possibilités qui s’offrent à lui pour prolonger la vie, pour se réparer par des prothèses qui mêleront de plus en plus les progrès de la robotique, de la bio-ingénierie et des nanotechnologies, voire de multiplier nos capacités naturelles ?

Ne voit-on pas déjà des précurseurs de réalité augmentée se profiler à l’horizon sous forme de lunettes interactives, de casques de vision à 360° et d’autres augmentateurs de nos capacités naturelles sans compter ces jeux interactifs dont se gavent la génération des "digitales natives" ?

Faut-il pour autant tomber dans l’utopie de la transhumanité qui prévoit que la technologie dominera l’univers et pourra se passer de l’avatar fragile et biologique que fût l’homo sapiens dans son bien court passage sur la terre ?

Une sorte de monde cybernétique dont la finalité serait d’atteindre l’éternité, résurgence fantasmatique de l’utopie dominante des religions nous promettant une vie éternelle.

Sans aller jusqu’à ces extrémités susceptibles d’accroitre l’inquiétude face à la prégnance de la technologie sur notre environnement, il faut bien reconnaître qu’aujourd’hui déjà le fameux test d’Alan Turing qui donnait comme preuve d’une intelligence artificielle notre incapacité à faire la différence entre un homme et un robot est bel et bien en train de se renverser.

Il est parfois bien difficile de faire la différence entre un homme et un robot lorsque nous discutons avec un interlocuteur dont le comportement avec nous est guidé par un logiciel.

Il n’y a qu’à faire un 36 machin ou rentrer dans une de ces échoppes bourrées de prothèses communicantes pour avoir une éclatante démonstration de cet envahissement d’un langage technoésotérique,une déshumanisation de la relation.

On assiste à la peur panique de certains devant cette incapacité de digestion de la technologie envahissante.

L’homme n’a jamais renoncé à la technologie mais la question n’est-elle pas plutôt aura-t-il aujourd’hui la sagesse de la tenir à distance ?

Sera-t-il mieux résister que l’obsédé sexuel de la guerre du feu à l’illusion de toute puissance sur son environnement ?

Patrice Leterrier

6 décembre 2012

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28 novembre 2012 3 28 /11 /novembre /2012 22:46

 

tablette-bebe.jpg


 

L

 

es analystes prévoient la vente de 3 millions de tablettes d’ici la fin de l’année en France et, selon ABI research, le cap des 100 millions de tablettes devraient être atteint dans le monde en 2012.

Il y a aujourd’hui plus de 5 milliards de téléphones portables, un milliard de smartphones et autant d'utilisateurs de Facebook.

Il n'est pas douteux que le profond bouleversement dans les communications interpersonnelles que nous vivons a déjà et aura de plus en plus d'impacts non seulement sur la forme mais aussi sur la nature même de l'interaction sociale.

Le succès incroyable des réseaux sociaux qui orientent en la formatant la relation, l'engouement, qui n'est pas que l'effet d'un marketing redoutablement efficace de la marque à la pomme, pour les tablettes modifient radicalement à la fois la forme, la distance, la temporalité mais aussi la nature des échanges.

Ceux que Nicolas Auray appelle "les natifs numériques", ces générations qui arrivent et qui n’ont pas connu le monde avant l’explosion communicante, se meuvent avec aisance dans un univers de voisinage sans référence spatiale ni même temporelle.

Le monde passe d’un petit nombre de relations fortes investies de chaleur humaine avec sa famille, ses voisins, ses amis "privés" a un grand nombre de relations faibles désinvesties émotionnellement et construites sur une supposée communauté d’opinions, d’intérêts ou de goût.

Avec l’homme 2.0 qui succède à l’homo faber de Bergson émergent de nouvelles formes de sociabilité dans un déferlement d’informations dont la fiabilité n’est plus garantie par la confiance en l’émetteur.

L’image que ce miroir virtuel renvoie n’est plus celle de notre seule apparence, de nos attitudes, de nos émotions, de notre discours, de nos archétypes socioculturels.

La valeur d’un individu n’a plus grand-chose à voir avec ces vertus morales et ces postures comportementales en accord avec des conventions iconographiques auxquelles s’accrochent encore certains dirigeants.

Elle se mesure aujourd’hui sur la toile à la capacité à être un "mailleur", un faiseur de réseaux.

La conjonction de ces nouveaux outils avec la puissance et la souplesse incroyable d’internet redéfinit la notion même de proximité, d’intimité et même d’identité.

Comme l’écrit le philosophe Jean Michel Besnier "les technologies sont comme les médicaments, à la fois des poisons et des remèdes".

Elles peuvent donner lieu à tous les excès, asservir des utilisateurs compulsifs, favoriser le développement de réseaux terroristes, mafieux ou pédophiles, exposer les plus jeunes à la pornographie, répandre et amplifier des rumeurs et même pousser des êtres fragiles au suicide.

Elles sont aussi porteuses de formidables (mais peut-être utopiques) espoirs notamment pour démultiplier le savoir et l’information vers des populations qui en sont aujourd'hui privées.

Elles ont montré leurs influences dans le vent de liberté qui a soufflé dans le Maghreb et le Proche-Orient.

Mais elles peuvent être à l’origine d’une nouvelle sorte de fracture cognitive entre ceux qui peuvent en disposer et qui la maîtrise et ceux qui en sont privés parce qu’ils n’ont pas les moyens ou les capacités pour l’apprivoiser.

L’hypersollicitation à laquelle elles nous soumettent réclame des capacités cognitives nouvelles pour gérer des stimulations multiples et simultanées.

Elle favorise une attitude réactive répondant dans l’instant aux sollicitations mais aussi une sorte de fractalisation de l’attention qui pousse à la découverte et à l’inattendu au détriment de la planification et de la continuité de l’action qu’il s’agisse par exemple de la lecture séquentielle d’un livre ou de la réalisation d’une tâche.

Ce qu’il y a de vraiment révolutionnaire dans ce nouveau paradigme de communication, ce qui va modifier aussi définitivement que l’invention de Gutenberg le paysage relationnel des humains, c’est cette convergence d’un univers de connaissance sans limite et de la multiplication de ces outils.


Patrice Leterrier

28 novembre 2012

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23 novembre 2012 5 23 /11 /novembre /2012 11:16

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L

 

e site du National Climatic Data Center nous apprend qu’octobre 2012 fût le 332ème mois consécutif dont la température était globalement au dessus de la moyenne du 20ème siècle  avec 0,63°C de plus.

Il publie également une intéressante carte des événements climatiques extrêmes de l’année 2012.

On y notera la fonte des glaces du Groenland, les ravages de Sandy en particulier en Haïti, les pluies records en Australie mais aussi le froid record en Argentine en octobre (le plus froid depuis 51 ans).

Michel Alberganti se fait lui l’écho d’une publication de la banque mondiale prédisant un réchauffement de 4°C à l’horizon 2100 et d’une communication de l’organisation météorologique mondiale (World meteorological Organization) annonçant que le CO2 avait atteint en 2011 un nouveau niveau record de 390,9 parties par million (ppm).

Ce qu’il y a de commun dans ces annonces c’est qu’elles ne parlent pas à l’imaginaire collectif.

Après tout qu’est-ce que cela peut faire moins d’un degré Celsius ou une dose homéopathique de 390 parties par million.

De plus, même si de lourds soupçons existent, personne ne peut affirmer avec certitude qu’il existe un lien entre les événements climatiques extrêmes que nous observons et le réchauffement climatique.

Une étude publiée en 2011 par John Cook et Stephan Lewandowsky démontrait qu’une désinformation solidement implantée continuera d’influencer même après qu’il fût avéré qu’elle était fausse.

Les auteurs soulignent que ce phénomène est d’autant plus fort si la désinformation soulève plus d’intérêt que sa rétractation.

C’est bien ce processus qu’exploitent ceux qui combattent l’idée de l’origine anthropique du réchauffement climatique.

Comme il est difficile, même si certains s’y essayent, de défendre l’idée qu’il n’y a pas de réchauffement climatique, prétendre que l’homme n’est pas à l’origine de celui-ci est beaucoup plus aisé.

D’abord, cette idée nous disculpe de toute responsabilité sur l’évolution de notre environnement.

Ses conséquences paraissent donc naturelles, de l’ordre des choses qui échappent à notre contrôle.

Dès lors pourquoi contrarier la volonté divine, pourquoi s’en préoccuper et surtout pourquoi contraindre les activités humaines pour en diminuer les effets ?

Cette position oblige les scientifiques qui la combattent à faire la preuve de l’origine humaine du réchauffement climatique.

Or ils ne peuvent qu’opposer un historique et des projections construites à partir de modèles complexes et donc abscons pour le grand public dont la validité ne s’impose pas au sens commun.

Les climatosceptiques se sont acharnés à les contester en recherchant dans l’immense travail fait par le GIEC les erreurs et/ou contradictions, qui sont inhérentes à ce genre de travail collégial.

Ils se gardent bien de s’en tenir aux conclusions du rapport final qui ne laisse aucun doute sur l’origine essentiellement liée à l’activité humaine du réchauffement climatique.

Mais dès lors que les scientifiques ne sont pas d’accord entre eux, pourquoi irions-nous croire ceux qui nous demandent des efforts ?

D’autant qu’il ne s’agit pas simplement des vœux pieux mais bien de mesures dont les conséquences économiques se traduiraient à court terme par des sacrifices pour des bénéfices dont profiteraient les générations futures.

Comment sortir de cette ornière dans laquelle les scientifiques semblent s’enliser avec le sentiment frustrant de prêcher dans le désert ?

Les auteurs de l’étude citée ci-dessus proposent, dans un guide en accès libre sur internet, d’appliquer des recettes simples en s’attachant d’abord non pas à ce que pensent les gens mais à la manière dont ils pensent.

On peut retenir en synthèse de cet utile aide-mémoire à l’usage des communicants que la règle d’or est de faire court, simple et clair.

Une démarche résumée dans l’acronyme KISS : Keep it Simple, Stupid.

J’essayerai donc de m’en tenir à ce conseil en espérant qu’il ne vous apparaît pas comme trop stupide.


Patrice Leterrier

22 novembre 2012

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20 novembre 2012 2 20 /11 /novembre /2012 15:59

 

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S

 

ur son blog, Pierre Barthélémy cite une étude évoquant la "Jungle" que serait notre nombril habité par une multitude de types de bactéries à faire pâlir les plus éminents bactériologistes.

Notre nombril est donc, avant d’être pour certains mégalomanes le centre du monde, le centre d’un monde d’une variété incroyable résistant a notre pratique, finalement assez récente, de récurer les moindres recoins de notre anatomie.

Mais puisque nous parlons de nombril, il n'est pas tout à fait hors sujet d'évoquer le nombrilisme que le petit Larousse définit comme un "égocentrisme narcissique".

Un égocentriste narcissique se nourrit du regard de l’autre.

Il n’a de cesse que d’y lire une admiration sans borne pour son allure, sa prestance, ses discours mais aussi, lorsqu’il sévit sur la toile, pour la teneur encyclopédique de ses contributions originales.

Aussi pourra-t-il avoir, pour flatter un ego insatiable, une fâcheuse tendance à favoriser un usage exagéré du copier/coller pour s’attribuer des pensées et des développements qui ne lui doivent rien.

Je vous accorde que le terme exagéré est sujet à interprétation.

Il n'est pas sans intérêt parfois de citer des auteurs pour appuyer un argument, de donner ses sources (souvent des liens hypertextes), de s’inspirer de maîtres à penser ayant souvent infiniment plus de recul que nous-mêmes, de reprendre à son compte des concepts et des idées que l’on partage.

Il est même assez passionnant, ayant découvert un sujet traité avec compétence et originalité par un autre, de faire partager son émerveillement, sa surprise, tel ou tel faits nouvellement découverts.

Mais ce qui pollue la toile, comme le monde universitaire et journalistique, c'est cette fâcheuse habitude de reprendre les textes d'autres (y compris bien sûr la source Wikipédia) pour se les approprier in extenso ou, pour les plus malins, en changeant la forme de la phrase, un verbe, un mot, un adjectif.

Olivier Hertel sur le site de Sciences & Vie titre "Éthique et tics du plagiat", un article dans lequel il dénonce l'envahissement de cette pratique dans le monde universitaire. 

En juillet dernier, le célèbre chroniqueur sur internet Jonah Lehrer a été obligé de démissionner du New York Time où il tenait un blog scientifique intitulé "Frontal Cortex" pour avoir inventé, dans son ouvrage "Imagine: How Creativity Works", des citations de Bob Dylan.

David Remnick, le rédacteur en chef du magazine a déclaré (je cite J): "This is a terrifically sad situation but, in the end, what is most important is the integrity of what we publish and what we stand for".

Je ne suis pas sûr que la même sévérité soit appliquée à certains journalistes français qui n’hésitent pas à recopier sans vergogne des dépêches (sans guillemets) ou à certains auteurs (par exemple et au hasard un ancien présentateur de journal télévisé) qui s’attribuent des textes qu’ils ont tout simplement recopiés.

Bien sûr il est bien difficile de fouiller tout ce qui paraît sur la toile pour démasquer les copieurs/colleurs, qui ont remplacés les chasseurs/cueilleurs qu’étaient nos lointains ancêtres, bien sûr c’est autre chose de tirer profits de ses plagiats que de commettre ce péché véniel dans un commentaire ou même sur un blog.

Il n’empêche que cette manie, qui tourne au tic chez certains, d’abuser de cette pratique peu enrichissante pollue la toile.

Que celui qui n’a jamais péché…D’accord mais si on essayait de faire un effort….

Patrice Leterrier

20 novembre 2012

 

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18 novembre 2012 7 18 /11 /novembre /2012 13:06

fantôme

L

’affaire est entendue : il n’y a pas de fantôme dans notre tête pas plus que dans les sinistres demeures que l’on a l’habitude de situer en haute Ecosse.

La formule de Jean Paul Sartre "l'existence précède l'essence", prend une signification bien différente de celle voulue par le chantre de l’existentialisme puisqu’il s’agit ici d’oser affirmer que le libre arbitre et la liberté individuelle sont des illusions façonnées par notre cerveau.

J’existe donc je pense nous dise aujourd’hui les scientifiques retournant la fameuse maxime de Descartes.

Toutes nos actions, toutes nos pensées, tous nos sentiments, dont un certain nombre nous paraissent sous le contrôle de notre libre arbitre, ne sont que les résultats de phénomènes physico-chimiques qui se déroulent en permanence dans ce vertigineux labyrinthe formé par quelques cent milliards de neurones qui communiquent par des centaines voire des dizaines de milliers de contacts synaptiques entre eux.

Ce sentiment de libre arbitre n’est que le résultat d’une facétie de notre cerveau qui semble nous faire croire que nous décidons parfois de nos actions c'est-à-dire que la pensée, la volonté de faire précède l’action alors même que les progrès récents de l’imagerie médicale nous prouvent souvent le contraire : la conscience de l’action ne précède pas son activation mais la suit. Nous agissons et dans le même temps, à l’échelle de notre conscience, nous pensons que nous avons décidé d’agir.

Cette réalité est d’autant plus vertigineuse qu’elle est elle-même d’abord et avant tout une pensée, c'est-à-dire un processus physico-chimique se déroulant dans notre cerveau.

Elle échappe par définition à la notion même de libre arbitre au sens cartésien c'est-à-dire dans une conception dualiste de l’esprit.

Le professeur Patrick Haggard, de l’Institut de neurosciences cognitives de l’University College de Londres, écrit "La vraie objection au libre arbitre dans le sens classique cartésien est conceptuelle plutôt qu’empirique. Il faut se débarrasser de ce moi pur, séparé du cerveau. Tout notre comportement est un produit de notre activité cérébrale. Et il semble peu probable qu’il y ait une sorte d’exception à la norme des opérations déterministes des neurones pour provoquer les actions".

Mais au fond ne se trouve-t-on pas dans cet apparent paradoxe au cœur même de la définition de l’humain, au cœur même de la notion de responsabilité qui s’appuie indéfectiblement sur la notion de libre arbitre, résumée dans cette formule de Patrick Haggard "Je crois que parler de libre arbitre est juste une façon de parler de cette complexité". ?

L’humain n’est-il pas justement, dans sa singularité, ce fantôme apparent de la responsabilité, ce fantastique résultat d’une machinerie vertigineuse ?

Nous avons plus ou moins le sentiment que nous la gouvernons, que nos actions ne sont pas toutes des "reflexes" qui échappent à notre conscience et à notre volonté.

Et pourtant ces pensées ne sont que le pur produit de notre cerveau même si les processus qui les sous-tendent sont d’une infinie complexité par rapport au comportement d’une amibe.

La société n’est pas possible sans le sens de la responsabilité individuelle et l’on pourrait sans doute dire que la société humaine est née de cet apprentissage collectif qui façonne nos cerveaux.

Elle n’existe que parce que nous avons ce sentiment d’autonomie, de responsabilité qui nous inspire le sens moral et les règles de vie en commun.

Et ce sentiment de libre arbitre n’est-il pas d’une certaine façon une fonction d’évaluation de la pertinence des actions, un jugement, base de l’apprentissage, qui sélectionne les comportements adaptés et élimine ceux qui ne vont pas dans le sens de la survie de l’espèce ou plus prosaïquement de notre confort, une sorte de régulateur de cet autre fantôme qu’on appelle le bonheur ?

Patrice Leterrier 

17 novembre 2012

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