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27 octobre 2013 7 27 /10 /octobre /2013 14:32

 

 

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L

 

es résultats d’une étude publiée dans le Times intitulée "pourquoi la plupart d'entre nous se moquent bien de savoir quelle planète ils laisseront à leurs petits-enfants" n’ont rien d’étonnant.

Il n’y a rien de choquant ou du moins de surprenant dans le fait que chacun privilégie ses intérêts à ceux des autres fussent-ils leur descendance plus ou moins lointaine.

Ne doit-on pas prendre acte que les citoyens réagissent en fonction de leurs intérêts et préfèrent des résultats à court terme à des promesses de "lendemains qui chantent" et qui "chanteraient" d’ailleurs essentiellement pour d’autres qu’eux ?

Les hommes ont inventé la politique pour compenser le naturel égoïsme des hommes et pour assurer une certaine solidarité entre eux.

C’est du moins l’une des plus nobles missions de l’engagement politique spécialement lorsque les bouleversements que nous vivons augmentent incroyablement les tensions entre les communautés humaines.

C’est donc aux politiques de créer les conditions d’une solidarité intergénérationnelle en favorisant le développement des énergies renouvelables et des "négawatts" par des aides aux particuliers et aux entreprises, par une véritable politique industrielle pour permettre l’émergence et le développement de solutions énergétiques innovantes, par le financement de programmes de recherches à des niveaux comparables à celui, par exemple, qu’il fournit pour l’hypothétique maitrise de la fusion nucléaire "civile" (je parle bien sûr d’Iter).

La solidarité avec les générations futures cela consiste d’abord à faire en sorte que l’effort demandé aujourd’hui soit considéré comme un investissement à long terme et donc supporté par la communauté et pas seulement par les usagers actuels qui n’ont, sans incitation forte, aucune chance de voir le retour sur investissement.

Les prévisions liées aux conséquences du réchauffement mettent bien en relief le coût exorbitant à terme pour l’humanité.

Éviter ce réchauffement excessif c’est éviter une partie de ces coûts pour les générations futures et donc c’est rentable au niveau de la planète.

Il est donc non seulement raisonnable mais juste d’aider nos concitoyens à œuvrer dans ce sens.

C’est en tout cas plus réaliste et probablement plus efficace que de faire appel à je ne sais quel "sens du devoir", d’évoquer une sorte de "religion" écologiste, de brandir une "éthique du sacrifice" ou encore d’essayer de culpabiliser les citoyens parce qu’ils ne font pas suffisamment d’économie d’énergie, parce qu’ils ne mangent pas bien, pas assez bio, parce qu’ils sont en un mot égoïstes!

Au-delà des vœux pieux exprimés lors du débat sur la transition énergétique faut-il encore que viennent des mesures concrètes c'est-à-dire d’ambitieuses aides aux investissements et aux coûts de fonctionnement des énergies renouvelables encore loin d’être compétitives aujourd’hui.

Il faut également une réelle transparence sur le coût à terme - pour les consommateurs et pour la compétitivité de notre pays - d’objectifs trop souvent d’abord justifiés par des marchandages politiques et par l’exploitation de la peur distillée sur le nucléaire à l’aune de la catastrophe de Fukushima.

Il faut aussi tirer toutes les leçons de l’exemple allemand comme le signale Cécile Boutelet dans sa chronique du monde du 23 août dernier intitulé "Les effets pervers de la transition énergétique en Allemagne".

La politique de nos voisins d’outre-rhin a pour conséquence que "les consommateurs et les petites et moyennes entreprises payent pour cette énergie un des tarifs les plus élevés d'Europe" ?

L’Allemagne a augmenté ces émissions de CO2 de 2% en 2012 du fait du retour du charbon dont on ne peut pas dire que ce soit une énergie particulièrement économe en émission de gaz à effet de serre.

Et pour finir Cécile Boutelet note que "la population, qui avait ardemment souhaité la sortie du nucléaire en 2011 après les accidents de Fukushima, se montre réticente à l'idée d'accueillir dans son jardin les milliers de kilomètres de lignes à haute tension nécessaires pour raccorder les parcs offshore du nord au sud industrialisé".


Patrice Leterrier

27 octobre 2013

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19 octobre 2013 6 19 /10 /octobre /2013 16:18

massivestars.jpg

L

ors de la dernière émission de François Busnel "La grande Librairie", Jean d’Ormesson repose à Hubert Reeves, devant l’incroyable "réglage de l’univers", la question de l’horloger de Voltaire :

"L'univers m'embarrasse, et je ne puis songer

Que cette horloge existe et n'ait pas d'horloger."

C’est une autre façon d’énoncer l‘interrogation de Leibniz "Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?" qui n’est d’ailleurs pas plus éclairante que son inverse "Pourquoi n’y aurait-il rien, pourquoi l’univers n’aurait-il pas toujours été ? ". 

Cette réponse de Voltaire relève du domaine des croyances et n’est bien sûr en aucune manière la preuve rationnelle de l’existence de Dieu pas plus que les vagabondages métaphysiques de Stephen Hawkins dans son livre "the grand design"dont Etienne Klein s’amuse en disant "Si la gravitation suffit pour créer l’univers, pourquoi ne pas dire que la gravitation, c’est Dieu ? Toute chute serait alors une expérience transcendantale." 

A cette interrogation, presqu’aussi vieille que l’histoire de l’homme, la réponse de l’astrophysicien Hubert Reeves mérite qu’on s’y arrête.

Il s’interroge si, devant cette réalité qui nous dépasse de toute part, on ne doit pas simplement admettre que notre cerveau n’est pas en mesure d’aborder l’énigme impénétrable du sens de l’univers dont on constate la succession de fins réglages nécessaires pour aboutir à l’existence de la vie ?

Il y avait le chat de Schrödinger, il y aura peut-être aussi un jour celui d’Hubert Reeves qui, pour illustrer sa pensée, prend comme exemple notre incapacité à enseigner la géométrie à un chat en dépit de toute envie et de toute l’énergie que l’on pourrait mettre à essayer de le faire.

Il ajoute "nous sommes devant le mystère du monde dans une situation analogue à celle du chat : notre esprit n’est pas en mesure de s’adresser à l’ensemble de ces problèmes." 

Au fond il complète la vision des limites de la connaissance scientifique du physicien Michel Spiro, "nos théories physiques exprimées en langage mathématique sont le produit de l’activité humaine. Et même les maths, montre le théorème d’incomplétude de Kurt Gödel, ne surgissent pas d’elles-mêmes, elles reposent sur des axiomes non démontrables. "

On rejoint dans cette vertigineuse évidence de notre incapacité à comprendre "le sens" de l’univers la fameuse phrase de Pascal "le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie." 

Mais ce silence n’est-il pas aussi paradoxalement une sorte de vacarme assourdissant des innombrables mystères que l’univers nous invite à percer et dont nous ne percevons qu’une infime partie, des bribes de mots, des débuts de phrases qui ne peuvent jamais combler l’impuissance et l’effroi dont parle Pascal devant notre incapacité à saisir le tout ?

Et Dieu dans tout ça ?

Dieu, que se soit celui de Saint Augustin, de Pascal, de Spinoza, de Teilhard de Chardin ou celui du charbonnier, ne sera jamais un objet de science et le silence éternel des espaces infinis ne peut apporter aucune réponse.

A chacun de construire la sienne face aux évidentes limites de la connaissance rationnelle et bien impuissant serait celui qui voudrait convaincre quiconque d'abandonner ses croyances au nom de la raison.

Car comme le dit le philosophe Jean-François Robredo "depuis Galilée,  philosophes et scientifiques savent que le mélange comme l’opposition entre science et religion sont stériles".


Patrice Leterrier

19 octobre 2013

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9 octobre 2013 3 09 /10 /octobre /2013 12:51

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J

amais la technologie et la science n’avaient aussi profondément bouleversé notre environnement quotidien et percé aussi finement les mystères de l’univers.

Et pourtant la morosité ambiante domine devant l’incapacité de nos dirigeants de saisir la nature et l’ampleur des profonds bouleversements que nous vivons.

L’absence d’ambition, d’imagination et de perspective caractérise aujourd’hui les politiques quand ils n’ont pas la dangereuse tendance à promettre n’importe quoi.

Il est troublant de constater que la belle époque au sujet de laquelle Charles Péguy écrivait, en 1913, «le monde a moins changé depuis Jésus-Christ qu'il n'a changé depuis trente ans» fût probablement moins révolutionnaire pour les conditions de vie de nos prédécesseurs que la période actuelle qui voit, par exemple, le nombre de téléphones portables dépasser celui de la population mondiale.

Nos concitoyens vécurent à la belle époque des changements énormes avec le premier moteur à explosion, la première automobile, le premier film, le premier aéroplane, le premier essai de TSF, le premier réseau électrique.

Ils s’accompagnèrent d’une véritable vénération des progrès de la science et de la technologie, d’un optimisme généralisé, d’une véritable boulimie pour le théâtre de boulevard et d’un engouement pour la prise de risque pour de folles aventures comme traverser la manche ou la méditerranée en aéroplane.

On assista également à un foisonnement artistique et intellectuel sans précèdent et surtout vigoureusement tourné vers des formes nouvelles d’expression.

Imaginez le renouvellement incroyable de la peinture avec des Pablo Picasso ou Georges Braque qui cassèrent tous les codes conventionnels de leur art dans le sillage des précurseurs que furent Van Gogh et Cézanne, le mouvement surréaliste avec des météores comme Guillaume Apollinaire, la musique qui rompt avec le passé portée par des phares comme Debussy, Ravel, Satie ou encore Stravinsky, la naissance de la psychanalyse, le renouveau d’un certain spiritualisme avec Henri Bergson, …

Les arts décoratifs totalement renouvelés par les volutes sensuelles d’un Hector Guimard ou les formes florales d’un Émile Gallé ou encore les bijoux inimitables d’un René Lalique.

Faut-il rappeler que cette période fut aussi celle de l’éclatement du génie littéraire d’un Marcel Proust et d’un André Gide ?

Et pourtant déjà à cette époque l'économiste Edmond Théry évoquait la «rupture provoquée par la brusque concurrence, anormale et illimitée, d'un immense pays nouveau » qui entraîne une «rupture violente de l'équilibre international sur lequel le régime social des grandes nations industrielles de l'Europe est actuellement établi», ce qui n’est pas sans rappeler les inquiétudes du philosophe Bernard Steigler qui se veut porteur d’une nouvelle utopie pour répondre à la métamorphose profonde dans sa durée et dans sa dureté que nous vivons où « De cette métamorphose doivent émerger une nouvelle économie, une nouvelle politique, de nouveaux savoirs, de nouvelles formes de vie et une nouvelle façon pour l’humanité dans sa totalité d’échanger et de s’individuer sur la base d’un nouveau modèle industriel. »

Karl Marx avait déjà écrit le Capital mais les bolchéviques n’avaient pas encore fait leur révolution. Ils portaient aussi à l’origine le rêve d’une utopie d’un autre ordre économique et social qui sombra dans l’horreur des goulags.

Que faut-il donc faire pour convaincre nos concitoyens que nous vivons une époque certes difficile mais passionnante et qu’il appartient à chacun d’entre nous d’inventer notre futur ?

Celui des joyeux drilles de la belle époque s’engloutit dans l’effroyable carnage de la première guerre mondiale.

Puissions-nous avoir le courage et l’ambition d’inventer un monde en paix pour les générations futures au lieu de ressasser à satiété les petites misères qui nous accablent.


Patrice Leterrier

9 octobre 2013

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16 septembre 2013 1 16 /09 /septembre /2013 14:53

 

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A

 

u moment où Voyager 1, la sonde lancée par la NASA en 1977, se trouve à 18 milliards de kilomètres de la terre soit 125 fois la distance de la terre au soleil et s’apprête à échapper à l’attraction de notre étoile en entrant dans cette zone inconnue qu’on appelle l'héliosphère,

Au lendemain de la journée du patrimoine dont c’était la 30ème édition et qui connaît depuis des années un succès incroyable auprès d’un large public,

Alors que des chercheurs de l’Imperial College de Londres et de l’université du Kent réalisent une bien étrange expérience qui permet de penser que la vie serait d’origine extraterrestre, un peu comme le symbolique doigt de Dieu donnant vie à l’homme comme Michel Ange l’a imaginé dans son immortelle œuvre du plafond de la chapelle Sixtine,

Dans ce temps incroyable où la moindre découverte, le plus anecdotique événement, la plus étrange des aventures, le quotidien de n’importe quel individu est immédiatement disponible à nos yeux et à nos oreilles, faut-il penser que la toute puissance d’internet, la mémoire infinie de Google nous dispensent d'encombrer notre mémoire des innombrables faits du temps présent, des abondantes traces laissées par nos prédécesseurs, des connaissances encyclopédiques accumulées par des générations de penseurs et de savants ?

En somme vaut-il mieux tête bien faite que tête bien pleine comme le prétendait Montaigne ?

Nul ne doute qu’une tête bien faite soit essentielle et que les premières des qualités intellectuelles sont probablement le goût du savoir, la curiosité et l’aptitude à apprendre.

Pour autant suffit-il de savoir apprendre pour penser et est-il inutile de savoir ?

Aucun doute qu’une pensée s’élabore à partir d’informations qui peuvent provenir de nos connaissances mais aussi de l’environnement et singulièrement de ce que la magie d’internet nous permet de découvrir en quelques clics.

Suffit-il en lieu et place de l'apprentissage des faits, de pratiquer la pensée critique, de se former à évaluer les innombrables informations disponibles dans l’environnement ?

Mais la pensée ne fonctionne pas comme une calculatrice à laquelle on donne des nombres et une procédure à appliquer.

Dans cet encore largement mystérieux organe qu’est le cerveau, les procédures et les faits sont intriqués de sorte que connaître c'est penser et que penser c'est connaître.

Comme l’explique le psychologue Daniel Willingham de l'Université de Virginie "Les processus de pensées critiques tels que le raisonnement et la résolution de problèmes sont intimement liés à la connaissance des faits qui est dans la mémoire à long terme (et pas seulement dans l'environnement)".

La pensée se nourrit des connaissances et il faut bien avoir quelque chose à penser pour penser.

La connaissance construit la pensée comme des doigts agiles de l'artiste émerge l’œuvre d'art mais la pensée structure la connaissance qui est toujours une expérience personnelle.

Et puis un jour l’œuvre d'art disparait comme le bel esprit qui habitait Albert Jacquard et il reste les traces indélébiles d’une pensée lumineuse construite sur une cathédrale de connaissances.


Patrice Leterrier

16 septembre 2013

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4 septembre 2013 3 04 /09 /septembre /2013 13:35

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S

i l’on en croit les hypothèses formulées par l’archéologue Natalie Uomini et le psychologue Georg Meyer, de l’université de Liverpool, le langage et la fabrication d’outils auraient pu évoluer en parallèle parce qu’ils mobilisent les mêmes régions cérébrales.

Que peut-on dire alors du futur langage de communication des hommes dans un environnement totalement bouleversé par l’explosion des outils de communication multimédia ?

Pourra-t-on longtemps par exemple préserver l’orthographe et la discipline syntaxique, continuer à développer la pratique de la rédaction, ignorer que les images font maintenant partie du quotidien de tout possesseur d’un smartphone en attendant l’apparition des lunettes interactives de Google ?

Comment ne pas souligner que les tweets développent la pratique du raccourci, que les "j’aime" de Facebook n’encouragent pas aux commentaires même s’ils n’ont pas comme seule alternative "je n’aime pas" mais une foule de réactions comme "je n’en fous", "cela ne me concerne pas", "je n’ai pas d’avis", autant de sentiments que la plupart des adeptes de ce réseau social ne prennent même plus la peine d’exprimer ?

Faut-il s’étonner ou s’inquiéter que tout article du web qui dépasse largement la taille d’un écran ne soit en général pas lu ?

Faut-il s’inquiéter qu’en janvier 2013 on trouve 21 700 entrées sous Google sur les dangers de l’eau de Javel et 8 seulement sur ses bienfaits, démontrant largement le niveau de désinformation qui règne sur la toile ?

Si les circuits de la création des outils primitifs comme des silex impliquent les mêmes zones cérébrales que le langage, qu’en est-il de celles mobilisées par les accros des jeux vidéos et quelles conséquences cette sur-utilisation a-t-elle sur le développement cérébral de gamins ayant constamment les yeux fixés sur leurs Ipad, Iphone ou console de jeux ?

La plasticité cérébrale récemment découverte par les neurologues est un formidable atout d’Homo Sapiens dont le développement peut se poursuivre pratiquement tout au long de sa vie.

Serait-ce aussi un danger face à un monde qui crée en quelques années plus d’informations que lors de toute l’histoire du développement de l’écriture ?

La généralisation de ces interfaces - de plus en plus omniprésentes, de plus en plus interactives, de plus en plus "intuitives", de moins en moins centrées sur la mémoire du détail, mobilisant de moins en moins une réflexion en aval - va-t-elle conduire à une atrophie de nos capacités d’expression voire cognitives ?

Pourtant même si la question de savoir si la pensée est contenue dans le langage reste ouverte, la grande magie du cerveau humain n’est-elle pas de pouvoir exprimer par des mots, par des nuances, par des expressions, nos pensées, nos émotions, nos ressentis qui vont bien au delà d’un simple clic sur "j’aime" ?

Assistera-t-on à une sorte de disparition de cette construction permanente du "roman de notre vie", qui passe par le langage et qui est pourtant si nécessaire à la construction de notre identité ?

La littérature et la langue avec son enveloppe formelle orthographique et syntaxique deviendra-t-elle un fossile soigneusement gardé par des spécialistes déconnectés du monde multimédiatique environnant, rejoignant ainsi les ultimes défenseurs des langues régionales ?

Mais on peut aussi se réjouir de la généralisation de l’accès à la culture, de l’engouement qui ne semble pas se démentir pour la littérature et le théâtre, de la résistance presqu’inattendue du codex papier face aux liseuses électroniques, de l’accès universel à la musique et à l’image malgré les efforts désespérés des éditeurs pour en restreindre la gratuité.

Le succès d’initiatives culturelles, telle que l’ouverture du Mucem à Marseille, contredit en tout cas joyeusement cette prédiction d’un monde dominé par des onomatopées primaires, des tweets désolants de platitude, des "j’aime" désespérants de banalité et autres signes primitifs qui ramènent l’homme peut-être bien avant que ses ancêtres eurent appris avec tant de talent à peindre sur les murs de leurs cavernes ou à tailler des silex.


Patrice Leterrier

4 septembre 2013

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20 août 2013 2 20 /08 /août /2013 19:05

 

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C

 

ette phrase qu’aurait murmuré Galilée à l’issue de son procès où il avait officiellement renié toutes ses convictions scientifiques est une illustration symbolique que les croyances et la connaissance ne font pas vraiment bon ménage.

D’aucuns pourraient penser que l’avènement de ce formidable outil d’information qu’est internet sonnerait le glas des croyances pour faire surgir spontanément un monde dominé par les sciences nous permettant de jeter un regard éclairé sur le monde.

Jamais en effet l’homme n’avait disposé d’une telle source directe et instantanée d’informations sur tous les sujets qui peuvent le préoccuper.

On pourra savoir en temps réel l’évolution de la population mondiale, les derniers résultats des recherches scientifiques, la découverte de telle ou telle espèce inconnue, et tous les éléments du plus simple au plus élaboré pour comprendre la théorie de la relativité ou encore les fondements de la mécanique quantique.

Gérald Bronner nous rappelle que "cinq fois plus d’informations ont circulé au début des années 2000 que depuis l’invention de l’imprimerie par Gutenberg".

Et pourtant jamais non plus, dans ce flot d’informations diluvien, les ennemis de la science n’avaient été aussi actifs.

Que ce soit les délires des tenants de complots divers et variés, les longues démonstrations biaisées des climatosceptiques, les énormités défendues par les créationnistes et d’autres se parant d’une pseudo approche scientifique pour défendre des contre-vérités indéfendables, la toile est littéralement infestée de leurs délires.

Et c’est sans compter aussi sur les innombrables écrits des intégristes religieux qui ont parfaitement compris le parti qu’ils pouvaient tirer d’Internet.

Au point qu’il est souvent nécessaire d’aller consulter les dernières pages d’une recherche sur Google pour trouver quelques bribes d’informations sérieuses sur certains sujets volontairement rendus polémiques par les ennemis de la vérité scientifique et les tenants des croyances extrémistes.

Nul doute qu’il y a largement de quoi alimenter notre biais de confirmation qui fait que nous accordons plus d’attention aux écrits qui confortent nos croyances et nos opinions qu’à ceux qui les contredisent.

Cette puissance des écrits négationnistes ou sectaires serait-elle due à l’indifférence des scientifiques peu préoccupés à réfuter des théories farfelues ?

Probablement un peu mais peut-être aussi par le fait que la tâche qui consiste à réfuter un à un les arguments avancés par ces briseurs de vérité est fastidieuse.

De plus elle laisse toujours l’impression désastreuse qu’il n’y a pas de fumée sans feu et que l’acharnement à réfuter ne peut complètement dissiper le doute quand il ne l’augmente pas.

Car bien souvent la conclusion n’est pas une affirmation mais seulement l’absence totale de preuve de ces théories fantaisistes qui frappent l’opinion.

Par exemple il n’existe aucune preuve sérieuse de l’action des antennes relais sur la santé mais on ne peut évidemment pas apporter la preuve que l’on ne pourrait pas en découvrir dans l’avenir.

Les négationnistes savent parfaitement utiliser le doute scientifique en le détournant de son corollaire qui est la preuve pour laisser planer le scepticisme au dessus des têtes de pauvres lecteurs assaillis d’argumentaires fallacieux.

Le marché cognitif fantastique ouvert par internet est largement occupé par les prosélytes de croyances et l’apparente pluralité des opinions est biaisée par le fait que leurs défenseurs sont beaucoup plus prolixes que ceux qui les combattent.

Fort de l’armure de la science, ils ne prennent en général même pas le temps de les contredire autrement qu’en haussant les épaules devant de "telles absurdités".

Le résultat est que ceux qui croient par exemple à l’existence d’un complot à l’origine des événements du 11 septembre 2001 trouveront une myriade de thèses confortant cette légende.

Elles rivaliseront d’imagination pour les convaincre à coup de démonstrations - certes fausses - mais tellement détaillées qu’elles auront l’apparence de la "vérité".

Ils peuvent ainsi en toute quiétude satisfaire leur biais naturel vers la confirmation confondant la quantité à la qualité.

Et pourtant elle tourne disait Galilée…


Patrice Leterrier

20 août 2013

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29 juillet 2013 1 29 /07 /juillet /2013 13:50

Madeleines-037.jpg

P

ierre Barthélémy évoque sur son blog une étude qui pourrait remettre sérieusement en cause le caractère purement humain de la mémoire autobiographique de nos actes.

Elle démontre sans l’ombre d’un doute que des chimpanzés sont parfaitement capables de se rappeler plusieurs années après qu’il y avait dans une boite une bague leur permettant d’accéder à de la nourriture hors de leur portée.

Ce n'est probablement pas la dernière faculté que l'on pensait être exclusive à l'homme que nous devons partager avec d’autres primates.

Les auteurs de l’étude évoquent dans leur article le célèbre exemple relaté par Marcel Proust dans le fameux passage de la Madeleine.

Rien ne dit cependant dans l'expérience faite par les chercheurs que le souvenir incontestable des chimpanzés déclenche l’avalanche d'associations auxquelles se livre Marcel Proust dans ce fameux texte.

Dans une interview accordée à l’occasion de la parution du premier volume de La recherche, Marcel Proust affirmait :"mon œuvre est dominée par la distinction entre la mémoire involontaire et la mémoire volontaire".

Mais dans ce fameux passage de la Madeleine, il s’agit plutôt de la recherche de souvenirs que de l’apparition spontanée et instantanée d’un souvenir involontaire. La tante Léonie et ses madeleines ne vient qu’après bien des contorsions pour donner sens à l’émotion initialement ressentie.

L’auteur y fait en fait une sorte d’expérimentation de souvenirs qui viennent à partir d’une émotion de départ sans motif apparent.

Nous avons tous vécu l’expérience, par exemple, de l’odeur d’herbes fraichement coupées déclenchant une image d’enfance et qu’à partir de cette image nous nous rappelions d’un moment précis de notre jeunesse.

Dans une étude de Simon Chu et John Downes, parue sur le site d’Oxford Journals, il apparaît, chez un groupe de personnes âgées en moyenne de 69 ans, que "la réminiscence olfactive renvoie ces personnes à l'époque de leurs 6 à 10 ans, alors que les souvenirs verbaux se situent plutôt dans la tranche d'âge 15-25 ans".

L'élaboration de ces souvenirs passe par le langage, cette faculté étonnamment développée chez Homo Sapiens.

Nancy Huston affirme que nous sommes d'abord une espèce fabulatrice qui invente en permanence l'histoire de sa propre vie dans un perpétuel renouvellement.

Il est plus que probable que l’auteur ait déformé la réalité insaisissable de l’événement qu’il raconte en évoquant son souvenir.

L’épisode des pavés dans la cour de l’hôtel de Guermantes dans le Temps retrouvé est par contre beaucoup plus illustratif de cette mémoire involontaire qui hantait Marcel Proust puisqu’il parle du surgissement soudain de "la sensation ressentie jadis sur deux dalles inégales du baptistère de Saint-Marc".

Apparemment les chimpanzés se rappellent que l'outil était déposé dans la boite mais rien ne permet de dire qu'ils se souviennent, de manière associative, de la couleur de la robe de l'expérimentatrice, de celles des murs et d'autres détails qui étaient concomitants avec leurs souvenirs utilitaires.

De plus le souvenir de Proust dans l'épisode de la madeleine est gustatif et donc olfactif.

La mémoire olfactive met en jeu des zones du cerveau distinctes de la mémoire visuelle.

Elle a également un pouvoir d'évocation plus grand que la mémoire visuelle.

Comme l'écrit Rémi Gervais du CNRS dans la revue la Recherche "l'accès massif de l'information olfactive à l'hippocampe pourrait donc être associée au pouvoir évocateur des odeurs".

Mais si la petite différence de deux molécules sur le gène FOXP2 entre l'homme et le chimpanzé n’existait pas, les chimpanzés auraient pu sans doute acquérir un langage comme l’homme.

Ils pourraient alors, tout comme Marcel Proust, nous raconter peut-être bien des choses autour du souvenir de ces bagues cachées dans des boites à moins qu’ils s’intéressent de prés dans leur laboratoire à ce curieux cousin sans poil incapable de grimper aux arbres…


Patrice Leterrier

29 juillet 2013

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21 juillet 2013 7 21 /07 /juillet /2013 21:10

 

Alphonse de Lamartine

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N

 

ous vivons entourés d’objets dont la complexité échappe totalement à notre entendement.

Bien sûr on pourra expliquer les principes de la radioconduction découverte par Edouard Branly en 1890, on pourra également donner des éclaircissements sur le fonctionnement des ordinateurs, sur le codage des données, sur le principe des transistors inventés en 1947, sur la reproduction des sons dont l’histoire est inséparable de celle de Thomas Edison et de son phonographe, etc.

Pour autant on n’aura pas et de loin décortiqué toutes les merveilleuses découvertes scientifiques pour la plupart apparues au XXème siècle et dont les applications vous permettent de tenir dans le creux de votre main un téléphone portable gavé de merveilles technologiques inconcevables il y a à peine un demi-siècle.

On est loin avec ces outils modernes du marteau, de la pelle ou même de la machine à calculer de Blaise Pascal.

L’outil moderne prend un statut intermédiaire entre l’homme et l’animal de compagnie.

D’ailleurs il ne viendrait à l’idée de personne de parler à sa fourchette comme il parle à son smartphone ni même à son ordinateur et à plein d’autres objets familiers qui semblent la plupart du temps obéir à nos ordres et dont nous supportons mal qu’ils dysfonctionnent au point de s’adresser à eux pour leur reprocher leurs incartades, quand nous ne nous abandonnons pas à leur attribuer les messages qu’ils nous envoient.

Doit-on au nom de cette complexité en apparence inextricable renoncer à redonner à ces objets leur statut d’outils, c'est-à-dire de prolongation de la maîtrise par l’homme de son environnement ?

Hervé Thys sur son blog cite Albert Einstein : "la plupart des gens ont justement un respect sacré des mots qu'ils sont incapables de comprendre ; quand ils peuvent comprendre un auteur, ils y voient un signe qu'il est superficiel."

Ne doit-on pas revenir à l’immense vertu de la simplicité qui ne veut pas dire pour autant la superficialité ?

Les générations "natives digitales" n’ont pas devant les objets technologiques cette admiration voire cette gêne qu’éprouvent ceux qui ont vécu la révolution d’Internet et du numérique.

Il n’est pas malsain de désacraliser ces objets au fonctionnement qui parait maintenant si naturel à nos bambins.

N’y a-t-il pas beaucoup à perdre à renoncer à en expliquer les principes à des gamins comme de ne plus savoir faire un calcul mental parce qu’ils ont au bout des doigts des calculettes extrayant en une fraction de seconde une racine carrée ?

La complexité de ces objets ne vient-elle pas de la multiplicité des applications de la science qu’ils utilisent et non de celle des principes qu’ils mettent en œuvre ?

Il ne s’agit pas de retourner aux sémaphores, aux courriers transportés par des chevaux, aux gramophones mais de faire découvrir à ces générations définitivement plongées dans un bain envahissant de technologies que derrière ces minuscules écrans qu’ils manipulent avec une agilité déconcertante se cachent de merveilleuses inventions du génie humain.

Et ces découvertes peuvent être expliquées avec des mots simples et imagés. Elles ont souvent une histoire au moins aussi passionnantes que les feuilletons insipides dont nous abreuvent la télévision.

L’histoire de la science et de la technologie est un roman passionnant plein de rebondissements inattendus, de personnages hauts en couleur, de passions, d’espoirs déçus mais au final de découvertes qui changent radicalement et définitivement notre vie sur terre.

Apprendre par exemple l’histoire de la première ligne télégraphique entre Baltimore et Washington construite en 1843 par Samuel Morse, l’inventeur du télégraphe, n’est-il pas au moins aussi important que de savoir que les 13 et 14 septembre 1515, François Ier battit avec ses alliés vénitiens des mercenaires suisses au service du duché de Milan ?

Patrice Leterrier

21 juillet 2013

 

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25 juin 2013 2 25 /06 /juin /2013 13:09

 

oubli.jpg


 

L

 

a plus grande partie des sollicitations qui assaillent en permanence nos sens n’arrivent pas à franchir le mur que notre cerveau s’escrime à construire pour nous foutre une paix royale.

Il daigne cependant nous en présenter une infime partie que nous nous empressons d’oublier avec insouciance.

Nous avons d’autant moins de scrupule à nous livrer à ce salutaire nettoyage qu’il faut bien reconnaître que ces événements, ces pensées, ces sentiments, ces émotions sont en général d’une banalité affligeante.

Au demeurant il n’est pas difficile d’imaginer qu’un monde où l’effaceur universel qui nous habite n’existerait pas serait totalement invivable.

Outre l’encombrement que cela provoquerait dans nos milliards de neurones, il faut bien reconnaître que l’intérêt d’une telle capacité mnésique serait plus que discutable.

Que nous apporterez de retenir des anecdotes aussi insignifiantes que, par exemple, la couleur de la cravate de son supérieur hiérarchique le mercredi 21 novembre dernier ?

Seulement voilà que les grands manitous du big data s’échinent à vouloir tracer nos moindres mouvements, posts, tweets, vagabondages sur internet.

Ils pensent ainsi pouvoir saisir notre personnalité intime au prétexte fallacieux de mieux cibler les choix qu’ils nous proposent.

Ils ont la fatuité de penser que nos traces sont les composantes secrètes de notre être intime.

Pensant ainsi percer nos secrets cachés, ils font de ce qu’ils croient être notre intimité, un bien de consommation qu’ils proposent à des gogos persuadés que la profondeur infinie des algorithmes que ces gourous du profilage peaufinent est un gage de la pertinence des cibles qu’ils leur offrent.

Si, par exemple, nous sommes allés vagabonder par hasard sur un site de vente de canaris lors d’une séance de serendipité paresseuse, ces savants découvreurs de nos goûts s’acharneront à nous proposer des offres d’achat d’oiseaux aux ramages plus superbes les uns que les autres.

L’insistance qu’ils ne manqueront pas d’avoir à nous soumettre à un matraquage publicitaire aura d’autant plus tendance à nous agacer fortement qu’il contribuera à rendre indélébile un événement que nous avions toute les raisons d’oublier.

Alors vous les apprentis sorciers qui pensaient pouvoir tout savoir de nous en nous pistant dans nos moindres gestes sur nos ordinateurs, tablettes ou autres portables, foutez nous la paix !

Sachez que vous passez à côté de l’essentiel de nos motivations, que vous perdez votre temps en dépensant ces millions de flops de vos puissants ordinateurs et ces milliards de gigabytes de données de vos bases tentaculaires.

Nous sommes avant tout des êtres d’oubli et retenir les faits anecdotiques de notre sillage sur internet ne vous dévoilent qu’un instant de notre trajectoire dont il y a de fortes chances que nous l’oublierons rapidement.

Ces géants de l’internet participent à la création d’un dangereux flicage qu’il faudra bien un jour interdire.

Ils font à notre insu un commerce bien indélicat de nos faits et gestes.

L’homme est fait pour oublier mais la vie en société est aussi faite pour qu’on oublie ce que vous avez fait du moins dans le cas où cela ne nuit pas à autrui ce qui est tout de même la majorité des cas.

Internet est un merveilleux outil de connaissances et d’informations mais il pourrait, si nous n’y prenons pas garde, devenir un puissant outil de violation permanente de la vie privée si ce n’est déjà fait.


Patrice Leterrier

24 juin 2013

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17 juin 2013 1 17 /06 /juin /2013 13:41

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S

 

ur son blog passeur de science, Pierre Barthélémy commente une étude publiée dans PLos One qui met en relief combien nos goûts en matière de boisson X-Cola sont fortement influencés par le phénomène de marque.

Les chercheurs ont distribué un mélange de trois boissons à base de Coca composé à part égale des deux plus célèbres d’entre elles et d’une autre marque générique d’un distributeur allemand.

Les cobayes étaient censés gouter ces trois marques plus une quatrième née de l’imagination des chercheurs.

Comme dans l’expérience célèbre sur le test de vins dont on avait manipulé les prix et les étiquettes, le phénomène de marque a joué à fond.

Chacun préférait nettement les boissons réputées aux autres alors qu’elles étaient parfaitement identiques.

Les chercheurs ont découverts que lorsqu’il s’agissait d’évaluer une boisson inconnue, une zone du cortex orbitofrontal généralement impliquée dans l’évaluation était plus active que lorsque le sujet buvait une boisson dont la réputation n’est plus à faire et dont la dégustation allumait le striatum ventral, région impliquée dans la récompense et le plaisir.

L’étude est amusante dans la mesure où elle déchiffre un peu le mécanisme subtil du goût dans un domaine très particulier qui est celui de cette boisson mondialement consommée et inventée en 1886 par le pharmacien John Pemberton.

Mais elle ne nous apprend pas grand-chose sur le subtil et complexe phénomène du goût qui n’est évidemment pas qu’une question de papilles et d’odeur ni d’aspect.

Si les grands chefs mettent un soin infini dans la présentation de leurs chef d’œuvres, les commentaires élogieux et pourtant sincères  qu’ils récoltent ne doivent bien sûr rien au hasard mais doivent tout de même pas mal au prix exorbitant de leurs compositions, traduction sociale de leur renommée.

Il n’est pas sûr que s’ils étaient servis avec les mêmes ingrédients chez le routier du coin, ils récoltent les mêmes hommages.

Mais au fond n’est-il pas quelque part rassurant que notre appréciation soit fondamentalement subjective ?

Nous savons bien que nous sommes à la fois des êtres de sens mais aussi de souvenirs et de jugements déjà établis.

Lorsque nous portons un met ou une boisson à notre bouche, c’est un mélange de chatouillement de nos papilles, de senteurs subtiles, de plaisir des yeux, de notoriété de l’auteur (en quelque sorte de la marque), de nos souvenirs qui déclenchent un tourbillon d’impulsions mettant en cause des millions de neurones et des milliards de connections que nous qualifions synthétiquement de plaisir ou au contraire de dégoût.

Nul doute que la madeleine de Proust serait probablement restée dans un sinistre anonymat sans le talent de cet auteur.

Cependant concernant cette boisson mondialement connue j’ai grande difficulté à y trouver la source d’un nouveau chef d’œuvre de la littérature.

Personnellement j’évoquerais plus facilement le ravissement d’une navette bénie par l’Archevêque de Marseille au goût inimitable de fleur d’oranger ou la délicate saveur d’une poignée de panisses ou un chichi fregi que nous concoctent avec talent les marchands de l’Estaque dans une délicieuse et inimitable odeur de friture.

Et le plaisir de déguster n’est-il pas aussi celui de contempler le bleu infini de la mer, de sentir l’odeur caractéristique des embruns, de laisser remonter en caravane les souvenirs d’enfance ?

Certes notre goût n’était peut-être pas aussi aguerri qu’aujourd’hui mais comment ne pas évoquer dans ces courts moments de dégustation les sensations de bonheur accompli que nous provoquaient ces petites fantaisies gustatives au goût bien affirmé et au caractère roboratif certain.

Allez ! Je vous laisse à votre madeleine, la mienne est liée à ces délices frits dégustés en trainant les pieds dans les feuilles de platane qui tapissaient une chaussée irrégulière longeant la voie d’un tramway dont le souvenir du son aigrelet de la cloche sonne encore dans mes oreilles.


Patrice Leterrier

17 juin 2013

 

 

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