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13 décembre 2011 2 13 /12 /décembre /2011 13:09

gosse-africain.jpg

Francis Pisani, sur son blog Winch5, regrette que le gagnant du concours "Competition Startup" beintoo.com s’inscrive dans une logique de rentabilité à cours terme.

Retournant l’expression de Steve Jobs, déjà canonisé par l’église des adorateurs de la pomme, il ajoute "L'univers n'est pas une pomme dans laquelle il faut laisser la marque de ses dents".

De son voyage africain il revient avec la conviction "qu'innover c'est résoudre un vieux problème avec des solutions nouvelles" sans les soumettre à la logique implacable du ROI (Return On Investment).

Mohammed Yunus, prix Nobel de la Paix, avait lancé il y a plus de trente ans, avec la Grameen Bank, l'idée de microcrédit pour les pauvres.

Microworld.com  poursuit cette initiative avec sa plateforme en ligne. C’est certainement ce genre de projets qui peut changer, en particulier en Afrique, la logique des investissements de la recherche du profit le plus important et le plus rapide vers celle d'un développement durable dont l’équilibre économique se juge en décennie et non en trimestre.

Mais l’initiative de Microworld est-elle à la hauteur des enjeux ?

Yunus clamait déjà que la pauvreté dans le monde ne pourrait être vaincue par les bons sentiments et les dons.

Certes les initiatives comme celle de Bill Gates et l'action des ONG dans le domaine de la faim et de la santé sont indispensables pour éviter de plus grands malheurs mais elles ne conduisent pas à un nouvel ordre économique et social en Afrique en particulier.

Le développement de cet immense continent a, en quelque sorte, la chance de ne pas être contraint de passer par le stade de la société industrielle pour entrer résolument dans l’ère des services et des TICs.

Il a besoin d'un modèle économique adapté à ce paradigme qui n'est certainement pas celui du capitalisme purement libéral obsédé par le profit à tout prix et surtout pas celui des multinationales tentaculaires en particulier dans le domaine agricole.

Le printemps Arabe a largement montré le rôle essentiel des nouvelles technologies dans la prise de conscience des populations mais les derniers développements montrent également que nous n'avons pas valeur de modèle pour ces pays qui sont à la recherche d’une nouvelle voie combinant le respect de leurs traditions, de leurs cultures, de leurs religions aux valeurs de liberté héritées du siècle des lumières même si les risques d’un islamisme dogmatique ne sont pas complètement écartés.

Au moment où l'exposition sur les zoos humains du musée du Quai Branly nous rappelle les terrifiantes erreurs de nos prédécesseurs persuadés d'être porteurs de missions "civilisatrice" et "évangélisatrice" auprès des populations indigènes, il est grand temps que nous concevions nos relations avec les populations africaines autrement qu’en terme de censeurs porteurs de je ne sais quels modèles culturel, démocratique et économique universels que nous pourrions imposer à ces pays.

Plus que jamais les initiatives doivent venir des africains eux-mêmes et notre véritable intérêt est aussi de favoriser l’éclosion des talents et des projets.

Selon les Nations Unies, la population africaine représentera plus d’un tiers de la population mondiale d’ici 2100 alors qu’elle ne représentait même pas 10% en 1950. Sur la même période l’Europe sera passée de 22% de la population mondiale à moins de 7%.

Il est urgent de comprendre et d’accompagner l’évolution de l’Afrique.

Il est de notre intérêt de reconnaître son rôle dans un nouvel équilibre mondial à construire.

Il est capital de changer radicalement notre vision de ce continent aujourd’hui encore trop marquée par un paternalisme néocolonialiste.


Patrice Leterrier 

13 décembre 2011

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12 décembre 2011 1 12 /12 /décembre /2011 13:06

LOL.jpg

P

ratik Dholakiya, écrit que les adeptes des réseaux sociaux en "sont devenus dépendants pour leurs relations sociales comme ils le sont de la nourriture, de l'eau ou de l'oxygène pour leur survie".

Il est vrai que l’on voit mal les accros de Facebook se priver de leur séance quotidienne de bavardage sur le site.

Certains verront l’évolution positive de la multiplication des contacts, de cette désynchronisation de la relation qui permet à tout un chacun d’entrer sans effraction en contact avec l’autre indépendamment de sa disponibilité au moment présent.

D’autres feront valoir aussi la suppression des distances qui permet de discuter en ligne et en même temps avec un "ami" japonais, un "pote" californien et son cousin de Toulouse.

Mais compareriez-vous l’émotion ressentie lorsqu’un de vos proches vous souhaite un joyeux anniversaire en vous prenant dans ses bras à celle des vœux qui viennent de vos "amis" sur Facebook alors que vous savez qu’ils n’ont rien de spontanés?

Un LOL ou  un Smiley reçu a-t-il la même force émotionnelle qu’un éclat de rire ou un sourire en tête à tête ?

L’impudeur internet auquel nous poussent les réseaux sociaux est souvent une imposture puisqu’elle concerne l’avatar que nous voulons bien faire connaître à nos "amis".

Sur internet chacun a la possibilité d’être lui-même (ce qui est déjà une entreprise bien difficile vu l’impossibilité de se connaître soi-même n’en déplaise à Socrate) ou d’être l’image de quelqu’un d’autre qu’il invente.

Certes on passe son temps à inventer la fable de sa vie, à paraître, mais il est difficile de se faire passer pour beaucoup plus jeune (ou plus vieux) que l’on est ou de mentir effrontément sur son aspect physique par exemple.

Difficile dans la vie réelle de se faire passer pour un tradder de 40 ans, vivant à Londres, roulant en Porsche Cayenne, mesurant 1,80 m, aimant Brahms et Mike Jagger, lisant Sagan et Kierkegaard quand on a 14 ans et qu’on vit dans les quartiers nord de Marseille par exemple.

Et que dire de l’appauvrissement des échanges qui, privés de la confrontation à la réaction de l’autre, se réduisent à des monologues juxtaposés ?

Car la conversation est en réalité une interaction subtile qui comprend bien sûr les mots, le sens des phrases mais aussi les silences, les hésitations, le ton de la voix, l’émotion ressentie, le regard, l’expression du visage, la gestuelle du partenaire…

La réaction de l’autre participe à notre propre réponse pour construire un échange qui ne se réduit pas à des phrases partagées mais bien à une relation interpersonnelle riche de tous ses aspects.

Il y a un paradoxe entre cette extraordinaire ouverture sur le monde et l’isolement physique auquel conduit l’utilisation d’Internet.

La facilitation apparente des relations qu’apportent les réseaux sociaux ne contribue-t-elle pas en réalité à un renforcement de l’isolement de l’internaute qui peut être un facteur anxiogène voire conduire à la dépression ?

La phobie sociale que les réseaux sociaux pourraient en apparence combattre n’est-elle pas en réalité renforcée par cette possibilité de contact sans confrontation physique ?

Comme il n’est pas neutre de se libérer de la lecture séquentielle d’un roman en batifolant sur son ebook de la lecture à la vision d’un film, à l’écoute d’une musique ou à l’exploration d’une référence, il n’est pas plus sans conséquence que le temps partagé, synchrone et localisé, mal assis devant un café plus ou moins chaud, dans le brouhaha ambiant soit remplacé par quelques minutes de frappe, seule derrière son clavier. 


Patrice Leterrier 

12 décembre 2011

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7 décembre 2011 3 07 /12 /décembre /2011 17:00

 

visiteurs-expo-coloniale-1907.jpg


S

i nous regardons 200 ans en arrière, nous sommes atterrés par l’indifférence générale d’hommes et de femmes pourtant porteurs des valeurs du siècle de lumières devant l’horrible exploitation de l’homme par l’homme : l’esclavage.

Le grand Voltaire, qui l’avait cependant dénoncé dans Candide, n’écrivait-il pas en 1755 dans son Essai sur les mœurs : "La race des Nègres est une espèce d’hommes différente de la nôtre [...] on peut dire que si leur intelligence n’est pas d’une autre espèce que notre entendement, elle est très inférieure."

Ne prétendait-il pas aussi dans son dictionnaire philosophique  que les juifs  n’étaient "qu’un peuple ignorant et barbare, qui joint depuis longtemps la plus sordide avarice à la plus détestable superstition et à la plus invincible haine pour tous les peuples qui les tolèrent et qui les enrichissent". 

Si nous observons le début du siècle dernier nous sommes stupéfaits de voir le discours des hommes politiques justifiant les pires horreurs au nom de l’évangélisation et de la mission civilisatrice de l’occident.

Alors que Lilian Thuram se présente comme le gardien de l'histoire des zoos humains au Quai Branly à Paris, se souvient-on que Paul Raynaud, ministre des Colonies, s’exclamait le 2 juillet 1931 : "La colonisation est un phénomène qui s’impose, car il est dans la nature des choses que les peuples arrivés à son niveau supérieur d’évolution se penchent vers ceux qui sont à son niveau inférieur pour les élever jusqu’à eux."

Ces phrases, œuvres d’un grand penseur respecté et d’un homme politique qui n’avait rien d’un extrémiste, nous paraissent aujourd’hui insufférables.

Personne ne pourrait oser les prononcer sans se faire immédiatement traiter de raciste, d’antisémite et de fasciste.

Peut-on espérer que nos descendants trouveront inimaginable la façon dont nous traitons les plus démunis d’entre nous ?

Resteront-ils ébahis, comme nous le sommes devant l’indifférence de nos prédécesseurs envers les "races inférieures", devant notre incapacité à vaincre la faim dans le monde, notre indifférence devant les ravages que nous faisons subir à la terre, le traitement inhumain de nos vieillards, de nos sans-abris, des réfugiés, de la liste trop longue des sacrifiés de la société ?

Peut-on croire que la globalisation des idées, des arts, des sciences, des technologies et de l’économie aujourd’hui possible grace à l’interconnexion mondiale, permettra un jour de passer d’un monde dominé par l’idée de l’autorité à un monde gouverné par l’autorité des idées ?

L’explosion des technologies, la fabuleuse aventure des biotechnologies, le monde encore balbutiant des neurosciences, les progrès incontestables de  la psychologie scientifique, les nanotechnologies,… ne seront des avancés pour la société que si les valeurs humaines reprennent le dessus sur l’insupportable tyrannie de l’économie.   

Le siècle des lumières nous a, malgré tout, laissé en héritage la grande idée des libertés et des droits de l’homme.

Saurons-nous léguer à nos descendants celle de la force de loi des idées de justice et de tolérance qui devraient s’appliquer partout dans le monde ?


 

Patrice Leterrier 

7 décembre 2011

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1 décembre 2011 4 01 /12 /décembre /2011 20:54

tortue


I 

l suffit d’avoir, un jour au moins, l’occasion de prendre le métro parisien pour s’apercevoir que plus personne ne regarde personne.

Soit le regard  est perdu dans je ne sais quel souci personnel, que personne ne souhaite partager, préoccupé que nous sommes tous par nos propres tracasseries, soit les yeux sont rivés sur de minuscules écrans sur lesquels s’agitent frénétiquement des doigts dont l’agilité peut rappeler parfois celle de virtuoses si ce n’est qu’elle s’applique généralement à de dérisoires messages piteusement insipides ou encore à des jeux qui développent merveilleusement la capacité… de jouer à ces jeux .

Puis les rames se vident, chacun se précipitant vers l’escalator le plus proche où il ne fait pas bon de ne pas tenir sa droite si on n’a pas décidé de l’escalader quatre à quatre.

C’est le règne absolu de l’urgence, de la vitesse, de l’orgie permanente d’informations, d’images, de sons laissant aucune place à la réflexion pour privilégier en permanence l’action.

Victor Hugo faisait dire Hernani (acte III, 4) "je suis une force qui va". Mon professeur de philo en terminale, qui n’avait pourtant pas encore expérimenté les dégâts de notre chronophagie obsessionnelle, s’exclamait déjà : "qui va – certes ! - mais qui va où ?"

Aujourd’hui où comme l’écrit Jacques Attali dans son billet nous devrions nous tourner "vers l’altruisme et le plaisir de faire plaisir", l’égocentrisme, nourri par les promesses insultantes des politiques d’un toujours plus suicidaire, se conforte dans une course en avant désespérée.

Beaucoup trop de Rastignac en ces temps où nous manquons de Gandhi et de mère Teresa!

Pas de doute que si nous pensions un peu plus aux autres le monde serait "moins pire" pour tous.

La sagesse - qui seule peut conduire au bonheur  - passe par le rappel de quelques fondamentaux à respecter dans la conduite  de nos vies.

Au premier plan certainement le besoin impératif de penser aux autres, non par je ne sais quelle grace divine qui nous frapperait mais parce que l’altérite est la condition même de notre conscience.

Mais aussi la nécessité de ne pas céder à l’obsession du siècle de la vitesse, de prendre le temps de ralentir comme nous y invite Christophe André dans le dernier Pour la Science.

Il nous rappelle que "les périodes d'apparent repos cérébral (sommeil, rêveries diurnes, mais aussi tous les moments de la journée où on laisse son esprit en roue libre) représentent des états précieux, durant lesquels les contenus mentaux se réorganisent".

Arrêtons donc un peu de sursaturer nos pauvres cerveaux de bruit et de fureur dont le sens se perd noyé sous le tas d’immondices recouvrant la vérité du monde.

Laissons à nos neurones le temps de la créativité tranquille.

Dégustons toutes les bonnes choses - qui ne sont pas toutes des plats savamment concoctés - mais quelque fois aussi simples que le spectacle d'un orage d'été ou d'un coucher de soleil flamboyant...

A la nécessité de l’altruisme, de la reconnaissance de l’altérité comme élément essentiel de notre construction j’ajouterai volontiers l’éloge de la lenteur qui n’a rien à voir avec la paresse.


Patrice Leterrier 

1 décembre 2011

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2 octobre 2011 7 02 /10 /octobre /2011 13:31

Kindle touch


S

i on fait une analogie entre le fonctionnement du cerveau comme un ensemble de neurones communiquant à travers des milliards de synapses et la toile sur internet vue comme un ensemble de publications  de toutes formes (textes, données, images, sons) reliées entre elles par un grand nombre de liens hypertextes, on peut y voir une sorte de metacerveau dont les ramifications ne cessent de se développer à un rythme effréné.

Pour autant la multiplication de ces connexions fait-elle sens et ce metacerveau engendre-t-il aussi une forme de metaintelligence ?

Dans le cerveau en construction d’un bambin des milliers de connexions synaptiques se forment à un rythme encore plus sidérant que sur internet.

Ce foisonnement de croissance ressemble à l’activité d’une forêt vierge.

Mais cette forêt est soumise à un élagage qui atteint le niveau de trois millions de synapses détruits par seconde dès l’âge de trois ans, une sorte de surabondance naturelle régulée par une sélection naturelle que ne renierait pas Charles Darwin.

Si certains synapses de notre cerveau sont éliminés au profit d’un ordre, qui reste un grand mystère pour les neurologues aussi fouineurs soient-ils, les liens hypertextes sur internet n’ont pas à leur disposition cet élagueur évolutionniste universel et le metacerveau de la toile n’engendre pas de lui-même une metaintelligence, un ordre supérieur qui viendrait en quelque sorte superviser l’ensemble des pages du web.

Si la toile rassemble une somme de connaissances en croissance perpétuelle, elle accumule en même temps un amas gigantesque de scories qui rendent parfois la navigation hasardeuse, trompeuse voire nocive.

Le cerveau s’organise dans une infinité de connexions qui permettent non seulement de ressentir mais également de donner du sens à notre environnement si ce n’est à notre vie.

La toile s’étend sans cesse sans qu’on puisse discerner vraiment un sens global.

Certes des réseaux de liens, qui sont l’œuvre de l’homme, apportent une profondeur presque fractale à la connaissance mais ce sont des ilots perdus dans une forêt envahissante et incohérente.

Nicholas Carr s’interroge sur le futur du livre de fiction confronté à l’arrivée de fonctionnalité comme le X-Ray de Kindle permettant de lier les mots d’un texte à une recherche dans un dictionnaire, une vidéo, une musique, une infographie etc.…

La publication par Amazon sur Kindle d’un roman truffé de liens hypertextes sonne-t-elle le glas du codex qui a permis, avec l’invention de l’imprimerie, la formidable aventure du livre permettant à tout un chacun de construire son propre imaginaire à partir d’un récit ?

Elle démontre en tout cas que la webification des textes ne concerne pas seulement les journaux, les manuels d’instructions, les ouvrages historiques, scientifiques, les communications des chercheurs… mais qu’elle risque également d’atteindre les œuvres d’imagination non pas seulement pour créer une nouvelle forme de fiction multimédia mais également pour dénaturer en quelque sorte l’univers clos du livre pour l’englober dans l’immense magma d’information de la toile, cette sorte de metacerveau qui n’a rien d’une metaintelligence si ce n’est d’être exactement le contraire.

On peut douter qu’il s’agisse en l’occurrence d’un progrès.  


Patrice Leterrier 

2 Octobre 2011

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8 septembre 2011 4 08 /09 /septembre /2011 14:49

dsk.reuters

T

he economist nous apprend que, depuis 1992, l’association caritative the Innocence Project a disculpé sur la base de tests ADN, 271 condamnés pour crime ayant fait en moyenne 12 années de prison et plus étonnant encore que le quart de ces personnes avait plaidé coupable.

Saul Kassin et Jennifer Perillo du John Jay College of Criminal Justice à New York ont mené une étude auprès de  71 étudiants qui confirme cette tendance incroyable que nous avons à avouer des actes que nous n’avons pas commis spécialement mais pas uniquement lorsque nous sommes soumis à la pression d’une autorité.

On sait pourtant qu’en droit français l’aveu réalisé devant une instance de justice a une force probante absolue et irrévocable sauf erreur de fait.

En 1965, le chanteur Guy Mardel avait représenté la France au concours de l’eurovision avec la chanson n’avoue jamais pour terminer 3ème.

Son conseil, comme celui de ne rien dire, semble avoir été suivi à la lettre par Dominique Strauss-Kahn malgré l’énorme pression médiatique et policière dont il a été l’objet.

Bien qu’il soit aujourd’hui libre et donc innocent des faits gravissimes qui lui étaient reprochés, il reste qu’il a perdu en moins de deux mois son poste, son honneur et ses espérances présidentielles alors qu’il était le grand favori des sondages.

D’aucuns se réjouissent à droite comme à gauche de cette disqualification de DSK dans la course à l’investiture socialiste, étape nécessaire mais pas suffisante pour être élu n’en déplaise à ceux qui oublient un peu vite la bérézina Jospinienne et la mauvaise surprise réservée par Jean-Marie Le Pen au premier tour de la présidentielle du 21 Avril 2002.

Pour revenir sur l’incroyable dégringolade de Dominique Strauss-Kahn, il n’y aurait rien de choquant au contraire qu'on ne sache jamais  ce qui s'est passé dans la suite 2806 du Sofitel.

Attendons donc qu’il parle mais ce serait étonnant que ce soit pour nous raconter en détail le déroulé des faits.

Les mœurs sexuelles (pour autant qu’elles soient licites) de tel ou tel homme ou femme publics sont du domaine de la vie privée et ne regardent qu’eux.

Il est assez choquant de voir Michel Rocard parler de maladie mentale pour qualifier ce qui pourrait être une addiction au sexe si commune dans le monde politique!

En quoi les appétits sexuels monnayés ou pas de DSK sont-ils un motif de disqualification ?

Au nom de quelle morale "catholo-bourgeoise" doit-on imposer une normalité sexuelle aux candidats aux élections ?

Et puisqu’on est dans le registre des troubles mentaux doit-on aussi se préoccuper des tendances paranoïaques si fréquentes dans le landernau politique ?

Malgré la règle sacrée de présomption d’innocence, il reste l’affaire Banon, la poursuite au civil aux États Unis et peut-être d’autres casseroles qu’on voudrait bien accrocher à cet ancien champion des sondages déjà terrassé par Lionel Jospin dans l’affaire de la MNEF en novembre 1999 dont il est sorti blanchi en 2001.

Il est d’ailleurs intéressant de remarquer comment Martine Aubry cherche à se démarquer de son ancien champion en mêlant curieusement politique et moral pour dire, en parfaite démagogue, qu’elle "pense la même chose que beaucoup de femmes sur l'attitude de Dominique Strauss-Kahn vis-à-vis des femmes".

La note que paie DSK est en tout cas sévère et j’imagine le scandale d’un possible candidat à l’élection américaine menotté par des policiers français parce qu’il serait accusé (à tort bien sûr !) par une femme de ménage, par exemple d’origine magrébine, à l’hôtel Georges V !


Patrice Leterrier 

8 septembre 2011

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30 août 2011 2 30 /08 /août /2011 12:12

steve jobs


L

a presse se déchaine pour faire de Steven Paul Jobs, démissionnaire de son poste de CEO d’Apple Inc., une idole portée aux nues, LE visionnaire mythique pour ne pas dire mystique de notre futur numérique.

Steve Jobs n'est ni un Dieu ni un extraterrestre même s’il fut incontestablement un des principaux pionniers de la révolution internet qui a commencé avec l’apparition des ordinateurs personnels.

C’est à seulement 21 ans le 1er Avril 1976 qu’il fonde avec Steve Wozniak et Ronald Wayne, Apple Computer Inc.

Moins d’un an plus tôt, son rival de toujours Bill Gates, alors âgé de 20 ans, avait fondé avec Paul Allen, Microcomputer Software devenu universellement connu sous le nom de Microsoft.

Steve Jobs fut probablement un de ceux qui a pressenti avant tout le monde le rôle capital des interfaces graphiques et compris, en visitant en 1979 le laboratoire Parc de Rank Xerox, que l’interface conçu par Douglas Engelbart en 1963 et implémenté sur leur prototype Alto allait révolutionner le monde naissant de la micro-informatique.

Aujourd’hui les objets d'Apple sont réputés beaux, toujours chèrs, souvent dépassés technologiquement, soigneusement verrouillés quelquefois jusqu’à la paranoïa mais ils sont aussi incroyablement conviviaux et simples à utiliser.

On ne peut nier le génie (ou la malice ?) marketing de Steve Jobs qui a su imposer sa marque en jouant d’abord le rôle de David dans sa rivalité avec Bill Gates-Goliath pour transformer la confrontation PC/Mac en une guerre de religion.

Il a compris le premier (parce que le multimédia et la facilité d’utilisation ont toujours été les points forts du Mac) tout le parti qu’il pouvait tirer de la déclinaison depuis l’ipod jusqu’à l’Ipad en passant par l’Iphone du savoir faire d’Apple en matière d’interface ce qui est d’abord un immense investissement logiciel avant d’être de la quincaillerie aussi reluisante qu’elle soit.

Les produits d’Apple sont d’ailleurs fabriqués, pour l’essentiel, dans des conditions parfois plus que discutables, par des sous-traitants en particulier chinois.

Steve Jobs fut un patron sans conteste adulé, celui qui a su faire un extraordinaire come-back après s’être fait virer par le champion du marketing John Sculley qu’il avait lui-même débauché de Pepsi Cola, un homme qui a fait d’un challenger sans avenir face au tsunami Microsoft une des premières capitalisations boursière au monde.

Mais il fut aussi un véritable dictateur redouté pour ses colères et ses condamnations sans appel et un capitaliste qui a eu à faire aux gendarmes boursiers dans une affaire d’anti-datage de stock-options.

Le monde selon Jobs est avant tout celui des applications payantes, de l’Icloud qui enferme un peu plus l’utilisateur dans une tour d’Ivoire jalousement gardée, un monde organisé pour le plus grand profit d’Apple.

L’avenir dira si le combat qui l’opposait aux défenseurs d’un monde ouvert comme Tim Berners-Lee pourra être gagné sans l’extraordinaire charisme de Steve Jobs.

Il s’agit avant tout d’une lutte sans merci, déjà perdue pour le monde des systèmes d’exploitation des Smartphones maintenant dominé par Androïd, pour une domination du marché des assistants personnels actuels et à venir.

Cela n’a pas vraiment grand-chose à voir, n’en déplaise au grand visionnaire Jacques Attali, avec "un monde rassemblé, où la règle de droit s’appliquerait partout, et où les jeunes l’emporteraient".

Steve Jobs, comme Bill Gates, a marqué son temps de son empreinte mais l’après Jobs est une toute autre histoire.

Saluons le courage d’un homme qui sait se retirer avant que la maladie ne le terrasse mais ne tombons pas dans une jobsmania faisant de lui le visionnaire du monde numérique.


Patrice Leterrier 

29 Août 2011

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15 juin 2011 3 15 /06 /juin /2011 15:08

cyberespace


D 

ans un rapport commandé par l’International Commission on Nuclear Non-proliferation and Disarmament, Jason Fritz affirme que des "cyberterroristes pourraient aussi provoquer un tir nucléaire en imitant les systèmes d’alarme et d’identification ou en endommageant les réseaux de communication" 

Il ajoute même que ce type d’attaque pouvait être "une alternative plus facile pour des groupes terroristes que la construction ou l'acquisition d'une arme nucléaire". 

Leon Panetta, futur secrétaire à la défense américaine a récemment déclaré "le prochain Pearl Harbour auquel nous seront confrontés pourrait très bien être une cyberattaque".

Ces affirmations sont de nature à déclencher la psychose d’une cyber-apocalypse venant remplacer dans l’imaginaire collectif celle d’une déflagration nucléaire mondiale qui courait au plus fort de la guerre froide dans les années 60.

La seule parade à ce risque serait un désarmement nucléaire total, mondial et coordonné qui n’est concevable (et encore) qu’en faisant usage de la force contre les pays potentiellement nucléaires et voyous.

Ce serait en fait faire courir un risque éminemment supérieur de réaction en chaine incontrôlable,

Force est de constater que nous vivons dans un monde où l’instantané est roi, ouvert à tous, interconnecté et d’une complexité sans cesse grandissante.

Dans ce monde nous ne sommes pas à l’abri de génies malveillants ni malheureusement d’un enchainement de circonstances voulues ou accidentelles à la manière de l’effet papillon d’Edward Lorenz.

Dans son rapport Jason Fritz écrit : “Une cyberattaque réussie nécessite de ne trouver qu’une seule faiblesse tandis qu’une cyberdéfense réussie nécessite de trouver toutes les faiblesses possibles. 

Cette vision paranoïaque et clairement "11 septembriste"de l’impossibilité de se prévenir réellement des risques inhérents au cyberespace ne mérite-t-elle pas d’être tempérée ?

A supposé que la première partie de son raisonnement soit vraie (ce qui reste à démontrer) l’efficacité d’une cyberdéfense ne repose-t-elle pas en premier lieu sur la robustesse de l’architecture d’isolation mise en œuvre et non pas sur une exhaustivité des parades ?

Pour simplifier, c’est le même principe que celui de la chambre forte des coffres bancaires mais avec des murs totalement impossibles à percer, ce qui est réalisable concernant l’isolation des effets des ondes électromagnétiques par de vulgaires cages de faraday.

On sait aussi que même si des solutions efficaces existent (et sont probablement mises en œuvre concernant le nucléaire militaire), elles ne sont pas forcément appliquées pour des raisons souvent médiocrement économiques à court terme (exemple un mur anti-tsunami d’une hauteur insuffisante) voire par une évaluation cynique du rapport coût/risque.

De plus l’isolation de l’extérieur ne règle pas le problème de la sécurité intérieure du système.

On a vu avec l’affaire Kerviel les dégâts que pouvaient faire un petit génie agissant de l’intérieur. En l’occurrence on ne parlait que de milliards d‘euros et pas de vies humaines…

La malveillance et la folie destructrice sont probablement uniformément réparties dans la population et le risque n’est pas uniquement dû aux seuls groupes terroristes que l’on nous montre symboliquement du doigt pour identifier le diable.

Dans l’univers du principe de précaution à outrance dans lequel nous vivons, certains attendent un environnement totalement aseptisé et sécurisé.

Personne ne peut évidemment le garantir mais faut-il pour autant vivre dans la crainte permanente comme ces pauvres victimes de gourous annonçant la fin du monde le 21 décembre 2012 ?

La vie n’est jamais sans risque mais reste tout de même une bien belle aventure même si le pire n’est jamais décevant.


Patrice Leterrier 

15 Juin 2011

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13 juin 2011 1 13 /06 /juin /2011 19:03

vache


U 

ne vache qui donne du lait humain, un paraplégique qui marche et un aveugle qui voie avec sa langue ou une rétine artificielle, un ordinateur qui bat les champions de jeopardize n’ont apparemment rien en commun.

Et pourtant ils sont les témoins de trois révolutions en marche : le mariage de la cybernétique et de la médecine, les progrès de la biogénétique et l’incroyable puissance conjuguée du concept d’informatique dans les nuages et des immenses bases de données qui ouvrent une nouvelle ère dans la relation homme machine.

L’explosion concomitante des technologies de l’information, des biotechnologies des nanotechnologies et des neurosciences crée un paradigme post-humain qui s’affranchit de la lenteur de l’évolution darwiniste.

Déjà avec les progrès de l’alimentation et ceux de la médecine, la taille moyenne de l’homme et l’espérance de vie ont plus changé en moins d’un siècle qu’au cours du millénaire qui précède.

Dans une conférence tenue en Octobre 2008 et intitulée "humanité pour le post humain", le philosophe Yves Michaud nous posait déjà la question "Que se passe-t-il si s'ouvre la perspective d'une transcendance à la fois par rapport aux dieux et par rapport à l'idée de l'homme elle-même"?

Soulignant le saut quantique des capacités de l’homme d’agir sur son espèce, voyant dans le dopage, l’usage de la drogue et la frénésie du recours à la chirurgie esthétique des signes évidents de la propension grandissante de l’homme à agir sur lui-même pour se transformer, Yves Michaud affirmait donc "nous sommes en fait entrés dans les temps de l’instrumentation de soi et du dépassement de l'humain. Le post-humain, c'est la perspective de l'homme non seulement artificiel, le cyborg, mais d'un homme infiniment plastique qui peut générer ses propres transformations."

Ainsi l’homme n’a plus à subir sa condition, à construire l’humanisme comme la continuation de la sagesse du passé mais il peut (et peut-être doit) se réinventer.

Ayant tué Dieu et peut-être l’homme lui-même au sens humaniste du terme, l’homme peut-il encore vraiment trouver le sens de sa propre action sur sa destinée et sur son quotidien ?

Aujourd’hui il baigne dans la béatitude de la découverte enfantine de la puissance de cette technologie qu’il regarde comme son œuvre, et par conséquent comme tenud à distance, mais elle envahit de plus en plus son quotidien, elle modifie les conditions même de son avenir, elle abolit des frontières entre le genre humain et le monde animal, elle supplante et supplantera de plus en plus ses défaillances biologiques, cognitives  et culturelles au point de laisser entrevoir l’illusion d’une éternité accessible, une sorte d’épousailles avec la technologie renouvelant le mythe de la nymphe et reine de l'île d'Ogygie Calypso qui promettait la vie éternelle à Ulysse (on connaît le choix sage de ce dernier de rejoindre Pénélope).

Aujourd’hui où la technologie triomphante nous éblouie par ses prouesses sans cesse renouvelées, le besoin de sens, de signification à l’action humaine doit impérativement reprendre sa place, son sens philosophique et politique dans l’acceptation étymologique du terme, c'est-à-dire l’art d’organiser avec sagesse et justice les actions des hommes pour son bonheur et la pérennité de son espèce.


Patrice Leterrier 

13 Juin 2011

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12 juin 2011 7 12 /06 /juin /2011 13:49

messier-17-vst


P

ierre Barthélémy sur son blog Globule et télescope nous propose un oxymore évocateur, parlant de nostalgie futuriste pour nous montrer comment, en 1969, on voyait la future invasion des écrans dans la maison.

Son oxymore n'a rien de l'obscure clarté qui tombe des étoiles que Pierre Corneille fait déclamer à Don Rodrigue dans le Cid mais souligne qu'il est peut-être plus facile de prévoir le passé (tiens, un oxymore !) que l'avenir encore que concernant l’origine de notre univers (y en a-t-il d’autres ?) le débat que l’on croyait lumineusement clos depuis la découverte du "décalage vers le rouge" du spectre des galaxies due à l’effet "Doppler-Fizeau" ne l’est pas vraiment.

Pour preuve la polémique entre Jean-Claude Pecker, astrophysicien, professeur honoraire au Collège de France et membre de l’Académie des sciences, qui préfère croire en un univers (avec un petit u et non un grand U qui signifierait une hypothèse d'unicité) en équilibre statique, et Suzy Collin-Zahn, Directeur de Recherches émérite au CNRS et astronome à l’observatoire de Meudon, qui défend bec et ongles le Big Bang..

Comment s’y retrouver dans les arguments des deux savants qui manient allégrement des concepts d’une obscure clarté pour nous ?

Un univers statique éviterait peut-être au temps de se fracasser contre le mur de Planck?

Je ne parle pas du temps qui est censé s’écouler dans un seul sens en dépit des fantasmes de certains auteurs qui voudraient pouvoir le remonter, celui dont les astrophysiciens nous annoncent une fin putative si lointaine qu’elle est inaccessible à notre conscience bornée par la fin, certaine elle, de notre propre vie. C’est ce temps dont le télescope VST nous donne de nouvelles merveilleuses images.

Je ne parle pas non plus de cet instant qui vient de passer et dont nous ne retiendrons probablement pas grand-chose à moins qu’il ne coïncide avec un événement qui nous marque.

Je ne parle pas non plus du temps passé, celui des petites madeleines de chacun qui déroule la fable de sa vie dont nous sommes tous les auteurs tellement sélectivement amnésiques dans une forme de pastvoir unique à chacun.

A moins que l’on donne au verbe prévoir l’unique sens d’imaginer qui justifierai pleinement  l’expression prévoir le passé qui perdrait ainsi son qualificatif d’oxymore.

Je parle de ce temps infiniment court que nos savants cherchent à reconstruire dans le grand collisionneur de hadrons et qui est supposé être celui qui précéda (le peu de temps que ce terme avait encore un sens) le Big bang avant que l’espace, le temps, la matière la lumière ne deviennent des concepts impossibles à maintenir dans un vertige scientifique inconcevable.

En attendant le soleil ne semble pas apprécier ce débat et exprime de nouveau sa colère par une tempête de classe 2 qui nous vaut de magnifiques images.


Patrice Leterrier 

12 Juin 2011

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