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20 janvier 2011 4 20 /01 /janvier /2011 20:52

hipparque-nicee


R 

eprenant les propos de l’économiste américain Tyler Cowen, Nicholas G. Carr analyse l’évolution de la longueur des textes publiés et notamment la relation qui semble exister entre la facilité d’accès à un texte et sa brièveté.

Devant  une offre informationnelle pléthorique, le cerveau aurait tendance à butiner des petites parcelles d’informations plutôt qu’à se fixer directement sur tel ou tel article plus approfondi.

Il est vrai que la myriade d’images, de textes, de vidéos non sollicités que nous présentent les sites internet ne démentent pas cette impression.

Cette évolution n’est surement pas neutre sur la façon dont nous accédons aujourd’hui à la culture et à l’information.

Tyler Cowen pense qu’il y aurait une sorte de radicalisation de la lecture qui se focaliserait sur les textes très courts et, lorsque l’intérêt est capté, sur les textes beaucoup plus longs, des analyses en profondeur, comme si le torrent de nouvelles courtes jouait un rôle de catalyseur d’attention.

On pourrait, si la chose était confirmée, y voir une évolution finalement positive de ce déferlement permanent d’images et de textes.

Mais cette évolution vers le plus en plus court n’est pas non plus sans effet sur la façon dont l’information nous est présentée.

Certains journalistes semblent habités par  un souci compulsif de faire plus vite, plus court et surtout avant tous les autres.

Un exemple caricatural de cette agitation est l’annonce faite à la suite d’une dépêche de l’AFP reprenant un article de Live science , relayé par 20 minutes, le Nouvel Observateur Libération et le Figaro annonçant que "selon le chercheur Parke Kunkle […] des mouvements célestes notamment dus à l’interaction gravitationnelle ont en effet modifié la position relative du Soleil, de la Terre et des constellations".

Il s’agit de la "précession des équinoxes", découverte par Hipparque deux siècles avant notre ère, qui ne doit donc rien au chercheur Parke Kundle et dont on peut s’étonner qu’elle puisse être présentée comme une hypothèse encore plus comme une découverte récente, à moins de sombrer dans une déviance du dualisme portant à mettre en cause des résultats incontestables comme les lois générales du mouvement des astres.

Ce qu’il y a de cocasse dans ce buzz inconséquent, ce n’est pas tellement l’inculture des rédacteurs mais plutôt ce relâchement général qui consiste à évaluer une information à l’aune de sa fraicheur sans souci de vérifier à minima sa source et son contenu…

A moins que ce ne soit une application inconsciente de la part de ces stakhanovistes du clavier des résultats de recherche de Gerardo Ramirez et Sian Beilock, du Département de psychologie de l'Université de Chicago, qui nous apprennent qu’écrire sur son anxiété a un effet bénéfique sur sa diminution.

Et puis, si vous êtes fatigué de vous livrer à une sérendipité vagabonde, il vous sera peut-être possible d’écouter dans le calme votre air de musique favori et d’attendre le moment sublime de votre passage préféré car cette attente pourrait créer chez vous, selon les travaux de chercheurs canadiens, un formidable état émotionnel euphorique déclenchant larmes ou frissons.

Cet état, analysé minutieusement à l’aide d’IRMf et de TEP (Tomographie par émission de positons), serait dû à une libération de dopamine dans le noyau caudé.

Selon ces chercheurs le caractère inattendu, en violation avec le motif qui le précède et surtout minutieusement retardé pour augmenter la tension liée à ce délai pourrait être la cause de ce shoot musical au demeurant moins dangereux qu’un verre de trop ou autre petit joint pas si inoffensif que l’on pourrait laisser croire.

Je vous quitte pour aller me shooter avec Mozart !


Patrice Leterrier

20 Janvier 2011

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